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LES BOUTONS-ENSEIGNES UN GROUPE ORIGINAL D’ENSEIGNES RELIGIEUSES DES XVe ET XVIe SIÈCLES par Simon CAHANIER* Article paru dans Revue Mabillon, n. s. t. 18 (= t. 89), 2017, p. 173-215. Les enseignes de pèlerinage médiévales demeurent des objets relativement mal connus et très peu étudiés malgré les travaux, en France, de Denis Bruna qui a attiré l’attention sur elles en publiant le catalogue de la collection d’enseignes du Musée national du Moyen Âge-Thermes et hôtel de Cluny et en proposant, dans l’ouvrage issu de sa thèse, l’étude de synthèse qui faisait défaut1. Ses travaux s’inscrivent dans la dynamique de publication, à partir des années 1980, des catalogues des grandes collections européennes d’enseignes de pèlerinage en Allemagne, aux Pays-Bas, en Grande-Bretagne ou dans les pays scandinaves 2, qui a mis fin à la longue période de désintérêt et d’oubli ayant suivi les recherches des précurseurs du XIXe siècle et du début du XXe, au premier rang desquels prend place Arthur Forgeais 3. Des découvertes archéologiques plus récentes ont par ailleurs considérablement augmenté nos connaissances aussi bien du point de vue des méthodes de fabrication, avec la fouille sur le Mont-Saint-Michel en 2004-2005 du premier atelier de « faiseurs d’enseignes » connu, daté des XIVe et XVe siècles 4, que de celui des pratiques, avec l’invention d’un ensemble d’enseignes datées du XIIIe au début du XVIe siècle, entre 1999 et 2003, dans le lit de la rivière Sainte-Catherine à Valenciennes 5. On peut aussi rappeler la découverte plus ponctuelle d’un moule pour des enseignes du Saint Suaire de Lirey à Machy (Aube), à quelques kilomètres de la collégiale de Lirey, en 2009 6. Or, si les enseignes de pèlerinage en alliage de plomb sont aujourd’hui relativement mieux connues, il en va tout autrement d’une catégorie d’enseignes en bronze signalée dès le XIXe siècle : les boutons-enseignes. Nous devons à Loïc Berton leur redécouverte dans les années 2000 ainsi que ce nom, attribué en raison de la similitude, déjà soulignée par d’autres auteurs, que présente le système de fixation avec celui d’un bouton. Malgré le précieux travail de référencement qu’il a mené jusqu’à son décès brutal en 2011, cette catégorie particulière d’enseignes n’a encore fait l’objet d’aucune étude précise. Nous proposons dans le présent article, pour combler ce manque, un premier état de la question. Nous nous sommes appuyé pour cette étude sur un corpus de quatre cent douze boutons-enseignes réunis au cours d’une veille informatique menée entre 2008 et avril 2017 et grâce à la bonne volonté de nombreux collectionneurs qui nous ont adressé les photographies et les données des exemplaires en leur possession. Ces renseignements (métrologie et, toutes les fois que cette information était disponible, lieu de découverte) ont été introduits dans une base de données qui permet de les aborder de manière statistique. En raison de la nature même des découvertes, le plus souvent fortuites et faites à l’aide de détecteurs de métaux, le corpus est amené à augmenter régulièrement dans les années à venir. Boutons ou enseignes ? Les boutons-enseignes sont de petites plaques de métal de formes diverses, mesurant une trentaine de millimètres de diamètre en général et portant un décor, presque toujours religieux, figuré en creux (fig. 1 et 2) 7. Malgré l’identité du système de fixation, un anneau au revers permettant la fixation au tissu, les fonctions des boutons-enseignes et des boutons ne sont pas comparables : en raison de leur taille et de la fragilité du système d’attache, il est très peu probable que les boutons-enseignes aient pu servir de système de fixation. Bien que ces « plaques 8 » aient été de façon très récurrente qualifiées « d’enseignes 9 », la comparaison avec les boutons est cependant ancienne : Eugène Hucher affirme que « c’est littéralement un grand bouton 10 » et Adrien Blanchet rappelle que l’attache « a fait prendre ces objets pour des boutons »11. L. Berton a particulièrement insisté sur cette similitude en donnant à ces objets le nom de « bouton-enseigne » qui rend compte avec beaucoup de justesse de leur nature 12. Il est évident en effet qu’en dépit d’une fonction très dissemblable ces deux catégories partagent un certain nombre de caractéristiques communes : taille réduite des boutonsenseignes, plus proche de celle des boutons que des enseignes antérieures, forme géométrique centrée et, surtout, anneau perpendiculaire fixé au dos en guise de système d’attache. Ces similitudes 1 témoignent vraisemblablement d’un phénomène d’adaptation technique : l’enseigne religieuse se serait transforméeen adoptant les caractéristiques techniques du bouton, apparu au XIIIe siècle et dont l’usage et la mode se répandent à la fin du XIVe et au cours du XVe siècle sur les vêtements, pourpoints ou jaques 13. L’innovation dans le système d’attache, radicalement différent de celui des enseignes en plomb-étain, constitue de fait l’élément le plus caractéristique de cet emprunt au domaine vestimentaire, d’autant plus vraisemblable que ce sont peut-être les mêmes artisans qui sont responsables de la confection de l’une et l’autre catégories d’objets. Cette pluralité des productions est en effet bien attestée pour les « bimbelotiers » qui réalisaient les enseignes en plomb 14. Cependant, la comparaison s’arrête là : il n’y a que peu de rapport, au-delà des aspects techniques, entre les boutons-enseignes et les boutons d’attache qui, sur les vêtements du XIVe siècle, permettent de rapprocher les habits du corps et suscitent l’horreur des moralistes 15. Il est ainsi peu probable que l’enseigne religieuse ait été concernée par la condamnation du bouton dans le texte chartreux intitulé Treictié des nouvelletez dou monde : « lessiez donques, biau filz, le boutonnement, c’est a dire la vaine gloire dou monde »16. Si les techniques changent radicalement, la plupart des boutons-enseignes demeurent de fait très proches des enseignes de pèlerinage médiévales en alliage de plomb. Tous les savants ou érudits qui ont eu affaire à ces objets soutiennent qu’il s’agit d’enseignes et il n’y a pas lieu de remettre leur jugement en cause même s’il est possible, comme nous le verrons, de préciser la nature de telles productions. L’iconographie, où s’expriment bien souvent des continuités avec les enseignes en plomb, constitue le lien le plus évident entre ces deux catégories d’objets de dévotion. Cela ne doit toutefois pas masquer l’originalité des boutonsenseignes qu’il convient de replacer dans un contexte plus large de diversification des petits objets de piété. Les auteurs de la fin du XIXe et du début du XXe siècle datent les boutonsenseignes de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle ; cette datation n’a jamais été remise en cause et doit être retenue pour toute une série de critères, notamment stylistiques et iconographiques, dont la liste pourrait être allongée17. Le style général est tout d’abord très proche des gravures ou des estampes de la fin du XVe siècle, notamment des illustrations des incunables ; certains costumes sont par ailleurs tout à fait typiques de la période. Plus spécifiquement, certains types confirment ponctuellement cette approximation : les enseignes au Suaire de Lirey-Chambéry présentent un style caractéristique de la seconde moitié du XVe siècle, quand la relique commence à voyager hors de la collégiale de Lirey : il est marqué par la présence de trois personnages mitrés exhibant le Suaire et non plus de deux. De plus, la découverte de plusieurs exemplaires dans la région de Chambéry, sans être un argument absolu, suggère qu’ils datent de l’époque de la conservation du Suaire dans cette ville, entre 1453 et 1562 18. La représentation de la Vierge des Sept Douleurs sur un exemplaire correspond aux canons du début du XVIe siècle 19. L’iconographie de saint Fiacre s’approche de celle des enseignes en plomb-étain les plus tardives que D. Bruna date du premier quart du XVIe siècle 20. Un exemplaire représentant saint Bavon correspond enfin très probablement au sanctuaire de Saint-Bavon de Gand et l’enseigne est donc sûrement antérieure à la destruction de l’abbaye en 1536. On peut donc globalement dater les boutons-enseignes des années 1450-1550 au plus large, plus probablement du dernier quart du XVe siècle et du premier quart du XVIe, une période de temps limitée qui correspond bien à l’homogénéité stylistique de l’ensemble des types connus tout en étant suffisamment longue pour permettre une importante diversité de modèles, la multiplicité des moules pour un même type et une diffusion assez large 21. D’autres éléments, notamment la découverte d’exemplaires en contexte archéologique, devraient permettre à l’avenir de confirmer et peut-être d’affiner cette estimation. L’apparition et la diffusion des boutons-enseignes s’effectuent dans un contexte de grande évolution et de diversification des petits objets de la piété personnelle : les enseignes en plomb-étain disparaissent peu à peu (les plus récentes sont datables du tout début du XVIe siècle) mais laissent place à une profusion de nouvelles formes telles les enseignes estampées sur de fines feuilles de métal et cousues dans les livres d’heures qui se diffusent dans les années 1480-1490, les véroniques en parchemin ou en cuir datables des alentours de 1500 ou encore les gravures qui se développent avec l’imprimerie à la fin du XVe siècle 22.Àcette liste de nouveaux supports de la piété populaire, il conviendra donc dorénavant d’ajouter les boutons-enseignes. 2 FIG. 1. Échantillon de boutons-enseignes (le numéro affecté à chacun renvoie au catalogue de l’appendice). a : Michel (no 45, var. 1) ; b : Barbe (no 61) ; c : Jacques (no 37, var. 1) ; d : Hubert (no 36, var. 1) ; e : Vierge à l’Enfant (no 14) ; f : Suaire de Lirey-Chambéry (no 8) ; g : Mathurin (no 44). © Simon Cahanier (dessins a-f) et Camille Bellenger (dessin g) / collection particulière. FIG. 2. Échantillon de boutons-enseignes (l’échelle n’est pas respectée). a : Annonciation (no 2) ; b : André (no 23) ; c-d : Barbe (no 61) ; e : Vierge à l’Enfant (no 11) ; f : Armoiries (no 75) ; g : Saint Louis (no 41) ; h : Pierre (no 47) ; i : Julien de Vouvantes (no 39) ; j : Notre Dame de Boulogne (no 19) ; k : Barbe et Nicolas (no 69). © C. Bellenger. Un groupe original d’objets de dévotion Une analyse de spectrométrie de fluorescence X, menée au Conservation laboratory du Musée de Birmingham sur un exemplaire trouvé en Grande- Bretagne en 2013, a confirmé les intuitions anciennes en montrant que le métal des boutons-enseignes est un alliage de cuivre à forte proportion d’étain, dit bronze blanc, plus fusible que le bronze et très dur, qui présente une fois poli la qualité esthétique d’avoir un éclat 3 semblable à celui de l’argent 23. Un unique exemplaire en plomb-étain est connu mais il est impossible de dire s’il s’agit d’un prototype assurant la transition entre les enseignes en alliage de plomb et les boutonsenseignes ou au contraire d’une imitation 24. Pour tous les boutons-enseignes à l’exception de celui-ci, l’attache est en fer et adopte la forme d’un anneau perpendiculaire à l’enseigne pris dans le bronze lors de la coulée ; en raison du haut degré de corrosion de la plupart des exemplaires, l’attache n’a été préservée que dans quelques rares cas où l’état de conservation est exceptionnel. Ce système est selon D. Bruna beaucoup plus rare que celui des anneaux de fixation ou de l’épingle, classiques pour les enseignes en plomb-étain, ce qui distingue les boutonsenseignes 25. Il faut par ailleurs signaler que sept exemplaires présentent la particularité d’avoir été percés ou découpés manifestement pour permettre de coudre le bouton sur une étoffe : la rupture de l’attache était donc fréquente dès l’époque de circulation des enseignes et devait en constituer le principal facteur de perte ou d’abandon de l’enseigne. Tous les boutons-enseignes sont conçus selon un plan centré. Une classification stricte prenant en compte l’orientation de l’axe de symétrie permet de distinguer quatorze formes distinctes plus ou moins fréquemment utilisées 26 : • • • • • • • • • • • • • • A : disque ; 160 exemplaires ; B : octogone à bords concaves ; axe : sommet ; 182 exemplaires ; C : octogone à bords concaves ; axe : côté ; 1 exemplaire ; D : octogone à bords convexes ; axe : sommet ; 8 exemplaires ; E : octogone à bords droits ; axe : sommet ; 5 exemplaires ; F : octogone à bords droits ; axe : côté ; 5 exemplaires ; G : losange ; axe : sommet ; 18 exemplaires ; H : carré ; 1 exemplaire ; I : hexagone ; axe : sommet ; 4 exemplaires ; J : hexagone ; axe : côté ; 1 exemplaire ; K : quadrilobe ; 2 exemplaires ; L : écu ; 1 exemplaire ; M : disque ajouré ; 1 exemplaire ; N : hexagone à bords concaves ; 0 exemplaire. FIG. 3. Répertoire des formes. © S. Cahanier. L’écart est très net entre les formes A et B d’une part, les seules régulièrement utilisées (elles représentent respectivement 38,83 %et 44,17 %soit, à elles seules, 83 %du corpus), et les autres qui sont rares (D et G), voire très rares ou exceptionnelles. Certaines formes rares n’ont été utilisées que pour des sujets iconographiques précis, ce qui pourrait être interprété comme l’indice d’une production particulière : il s’agit des formes F et J pour saint Servais (numéro 52 du catalogue), J aussi pour sainte Hélène (numéro 63), K et L pour saint Nicolas (numéro 46), M pour sainte Barbe (numéro 61) 27. En se fondant sur les méthodes de fabrication des enseignes en plombétain, L. Berton a proposé une reconstitution du processus de fabrication des boutons-enseignes tout à fait vraisemblable. Étant donné qu’aucun moule n’est connu pour ce type d’objet, contrairement aux enseignes proprement dites, il n’est 4 pas possible de dépasser ou nuancer ses arguments fondés sur l’observation des photographies des exemplaires à sa disposition : La gravure est très nette : soit elle était exécutée au burin par des gens très exercés, reproduisant très fidèlement un modèle (reporté sur le bouton par un procédé quelconque), soit, et c’est plus réaliste, le bouton sortant du moule comportait déjà le décor en filigrane, qu’il suffisait de « nettoyer » proprement au burin de graveur. L’examen de trois boutons semblables [...] révèle que la composition générale est identique au moindre détail près. [...] Le moule (en argile, en schiste ardoisier ou en calcaire ?) devait se composer d’une valve empreinte d’un prototype du bouton gravé. L’autre valve, très plate, comportait seulement un léger évidement par où passait le fil de fer de l’annelet (le bronze s’est parfois un peu échappé par cette fente) 28. La dernière étape du travail consistait très certainement en un polissage : seule la face décorée était polie pour obtenir un aspect argenté, tandis que l’arrière restait brut de coulée. Comme L. Berton l’a supposé, les nombreux exemplaires d’un même modèle identiques au détail voire au défaut près prouvent que les boutons-enseignes étaient produits en série à partir de moules réutilisables 29. L’examen des pièces de notre corpus nous permet d’induire l’existence d’au moins deux cent vingt moules ; le plus productif d’entre eux, un moule représentant saint Mathurin, a fourni dix exemplaires relevés, ce qui doit être considéré comme un nombre minimum. Même si le métal et les techniques ont changé, le mode de production ne diffère donc pas radicalement de celui des enseignes médiévales en plomb. En revanche, de nombreux caractères originaux les distinguent : métal, variété des formes, système de fixation, gravure en creux, dimensions. La fragilité de l’alliage ne suffit pas à expliquer le choix de petites dimensions, le plomb-étain étant lui-même très fragile ; il est probablement lié aux rapports qu’entretiennent les boutons-enseignes avec les boutons vestimentaires.Pour tous ces traits, les boutons-enseignes constituent un groupe particulièrement original d’objets de dévotion. Historique de la recherche Si aucune étude générale des boutons-enseignes n’a été réalisée, plusieurs auteurs ont publié un nombre plus ou moins important d’exemplaires et ont émis à cette occasion des hypothèses sur leur datation et leur fonction. Un bref historique de la recherche nous permettra de mettre en évidence l’évolution de la place accordée dans l’étude des enseignes religieuses à cette catégorie si particulière. Les premiers exemplaires de boutons-enseignes répertoriés ont été découverts à Paris au milieu du XIXe siècle lors des travaux de dragage de la Seine qui ont attiré l’attention de quelques savants sur les petits objets de piété en général et sur les enseignes de pèlerinage en particulier. Ils ne sont alors pas distingués de leurs précurseurs en plomb-étain bien identifiés par ailleurs et connus par les textes médiévaux. E. Hucher en publie ainsi deux en 1853 mais ne reconnaît pas explicitement leur spécificité bien qu’il prétende connaître d’autres exemplaires comparables : « J’en connais un assez grand nombre en lozange comme celle [de sainte Barbe] ou circulaires comme celle de saint Julien »30. Il est le premier à dater ces objets de la fin du XVe siècle ou du début du XVIe. Dix ans plus tard, A. Forgeais publie deux nouveaux exemplaires, découverts en 1852 et 1858, sans les rapprocher entre eux et sans les distinguer des enseignes en plombétain 31. Louis Dancoisne est le premier, lorsqu’il publie en 1880 un exemplaire provenant du Pas-deCalais, à reconnaître explicitement l’originalité des boutons-enseignes par rapport aux enseignes de plomb : « Il était cependant des enseignes d’un genre tout différent [...] » 32. Toutefois, la limitation de son corpus a un individu unique ne lui permet pas d’émettre l’hypothèse qu’il est en présence d’un groupe inédit à part entière. Ce n’est qu’au cours du premier quart du XXe siècle qu’une telle idée émerge, au moment où deux auteurs, John Evans en Angleterre et A. Blanchet en France, rassemblent des collections qui leurs permettent de mettre en avant la spécificité des boutons-enseignes. Ils publient respectivement en 1908 et 1923 deux importants articles intitulés « Notes on a Collection of Pilgrims’ Signs or Amulets » 33 et « Sur une classe inédite d’enseignes de pèlerinage » 34. A. Blanchet décrit quatre exemplaires encore inédits : Il existe une classe de petits monuments sur lesquels je désire appeler l’attention de la Société [nationale des antiquaires de France]. Ce sont de petites plaques octogonales, dont les côtés sont formés par des segments de cercle et dont les types apparaissent en creux. Au dos de ces plaques, il y a généralement un appendice de métal qui a fait prendre ces objets pour des boutons. Le métal est un bronze plus ou moins blanchâtre. [...] La série que je vous signale n’est pas nombreuse, peut-être parce que l’attention n’a pas encore été attirée sur ces petits monuments 35. Il semble ignorer la collection de J. Evans publiée une quinzaine d’années plus tôt, réunie en près de trentecinq ans et comptant pas moins de vingtet- un exemplaires, décrite dans des termes quasiment identiques 36. 5 Ces deux auteurs posent les premières problématiques. Ils distinguent clairement les boutons-enseignes des enseignes en plomb-étain qu’ils jugent plus anciennes et établissent la datation, comme E. Hucher avant eux, sur la base de critères stylistiques. A. Blanchet conclut qu’on « peut les considérer presque sûrement comme des enseignes de pèlerinage d’un type inédit jusqu’à ce jour »37. Parallèlement, d’autres rares auteurs continuent de publier des exemplaires sans tenir compte de leur particularité 38. Il faut souligner qu’au sein de cette tradition, J. Evans est le seul à faire référence aux travaux de ces prédécesseurs 39, sans pour autant étudier spécifiquement les exemplaires qui n’appartiennent pas à sa propre collection ; les travaux et les idées restent donc dans l’ensemble isolés et aucune synthèse n’est proposée. L’étude des enseignes de pèlerinage en général est alors délaissée dans les décennies qui suivent et les boutons-enseignes, trop rares pour véritablement susciter l’intérêt des chercheurs, sont complètement oubliés.D. Bruna, qui apublié enFrance les premières études contemporaines sur les enseignes de pèlerinage, ne les distingue pas plus des enseignes en plomb que les auteurs du XIXe siècle et se borne à signaler, pour un exemplaire du Saint Suaire, qu’il s’agit d’une « enseigne de pèlerinage plus tardive [qu’un exemplaireenplombdatéde1350-1453],enbronze » 40. Il faut attendre le début des années 2000 pour que les boutons-enseignes attirent de nouveau l’attention, en raison notamment du développement conjoint d’Internet et de l’usage des détecteurs de métaux qui ont multiplié les découvertes et facilité leur diffusion. C’est à L. Berton que l’on doit le premier réel travail de référencement publié dans une série d’articles entre 2003 et 2011. Dans une première synthèse parue en 2005, il référençait vingt-huit exemplaires pour dix-sept types ; dans son dernier article le catalogue avait atteint cent dix-huit exemplaires pour quarante-sept types distincts, presque tous inédits 41 ! Son travail a servi de base à notre étude, fondée, comme nous l’avons vu, sur un corpus beaucoup plus vaste (donc abordable pour la première fois de manière statistique) de quatre cent douze exemplaires correspondant à soixante-dix-sept types qu’il convient maintenant de présenter. De fait, l’interprétation que l’on peut proposer de ces objets est indissociabledel’analysedeleur iconographie. Typologie des sujets iconographiques Inventaire des types Les sujets représentés dans notre corpus sont toujours religieux à une exception près. Soixante-dix-sept sujets iconographiques (ou « types ») ont été identifiés, que nous proposons de regrouper ci-dessous en neuf catégories 42. Ancien Testament (un type) Christ Vierge (treize types) Saints et saintes Adam et Ève (1) scènes narratives (quatre types) : Annonciation (1), Nativité (2), Crucifixion (16), Noli me tangere (3) emblèmes (quatre types) : Exaltation de la Croix (2), Monogramme IHS (5), Suaire de Lirey-Chambéry (23), Sainte Face (3) (voir aussi Pietà) six Vierges à l’enfant (1, 1, 1, 2, 2, 1), Vierge des sept douleurs (1), Pietà accompagnée des Arma Christi (1), Vierge en gloire (13), Notre Dame de Boulogne (6), Notre Dame de Liesse (3), Notre Dame du Mont-Roland (1), Notre Dame de la Poterie (identification incertaine ; 2) saints (trente-sept types) : André (11), Antoine (10), Bavon (1), Corneille (1), Charlemagne (1), Christophe (1), Claude (12), Éloi (5), Étienne (1), Fiacre (4), François d’Assise (1), Georges (5), Grégoire le Grand (1), Hubert (17), Jacques le Majeur (7), Jean Baptiste (12), Julien de Vouvantes (5), Julien l’Hospitalier (2), Louis IX (2), Mansuy (2), Martin (1), Mathurin (40), Michel (11), Nicolas (18), Pierre (3), Quentin (5), Quirin (2), Roch (3), Sébastien (9), Servais (11), Simon (3), Thibaut (identification incertaine ; 1), cinq personnages indéterminés (5 × 1) saintes (huit types) : Anne trinitaire (3), Barbe (71), Catherine (4), Hélène (5), Marguerite (1), Syre (1), Véronique (3), une sainte indéterminée (1) plusieurs saints (sept types) : Barbe accompagnée de Jacques, 6 Types laïcs (un type) Types indéfinissables (deux types) Nicolas, Sébastien ou la Vierge (1, 6, 1, 3), Hélène et la Vierge (1), Pierre et Paul (1), Véronique, Pierre et Paul (1) armoiries (1) (1, 1) Seuls quelques-uns de ces types sont très fréquents : Barbe est surreprésentée avec trente-sept moules totalisant soixante et onze exemplaires où elle apparaît seule et six moules totalisant onze exemplaires où elle apparaît associée à un autre personnage (soit 20 % du corpus total) ; loin derrière elle, Mathurin et le Suaire de Lirey-Chambéry comptabilisent quarante et vingt-trois exemplaires pour seulement huit et six moules respectivement ; la Crucifixion, la Vierge en gloire, André, Claude, Hubert, Jean Baptiste, Michel, Nicolas et Servais ont livré entre dix et dix-huit exemplaires, mais le nombre de moules, souvent six ou sept, ne dépasse jamais onze (la Crucifixion et Nicolas). Ces douze types totalisent 62 % du corpus et 52 %du total des moules répertoriés. À l’inverse, cinquante et un types ne sont connus que pour un moule et trente-sept d’entre eux n’ont livré à ce jour qu’un seul exemplaire. Le constat qui s’impose est celui d’un grand déséquilibre : quelques types très populaires sont accompagnés d’un grand nombre d’autres très peu fréquents et sans doute très peu produits. Barbe présente trois fois plus de moules que n’importe quel autre sujet iconographique. L’analyse de la composition du corpus des saints et des saintes représentés sur les boutons-enseignes peut s’avérer intéressante, non en soi, mais parce qu’elle illustre, à travers un support particulier à une époque précise du Moyen Âge, le champ des dévotions aux saints et peut permettre des études comparatives diachroniques et synchroniques avec d’autres ensembles. Il est possible de les regrouper, selon la période historique au cours de laquelle ils ont vécu, en quatre groupes qui se distinguent à la fois par la personnalité des personnages retenus et par leur nombre. Le Ier siècle fournit neuf saints et saintes, qui ont tous côtoyé le Christ ; six sontmartyrs (Étienne, Jean Baptiste) dont quatre apôtres (André, Jacques, Pierre et Paul qui ne figure néanmoins pas dans la liste canonique). S’ajoutent Anne, ainsi que Simon de Cyrène et Véronique tous deux associés à la Passion du Christ. Les II-IVe siècles concentrent la majorité des saints personnages, dix-neuf sur trente-neuf identifiés 43. Dix sont martyrs, dont tous les saints soldats sauf Martin (Quirin, Sébastien, Georges, Julien de Vouvantes) et toutes les vierges (Barbe, Catherine, Marguerite), ainsi que deux évangélisateurs (Quentin, Christophe) et un pape (Corneille) ; pour la plupart ils ont été victimes des persécutions de l’Antiquité tardive, auxquelles se rattache également Syre, étroitement liée au martyr Savinien. Ils sont rejoints dans la deuxième moitié du IVe siècle par les évêques (Mansuy, Martin, Nicolas, Servais) qui ne sont jamais martyrs. S’ajoutent Antoine, Julien l’Hospitalier, Mathurin et Hélène qui n’entrent dans aucune de ces catégories. Après le IVe siècle, le nombre de personnages représentés sur les boutons-enseignes ne cesse de décroître ; les martyrs et les femmes disparaissent. Les VIe-IXe siècles ont fourni sept saints, presque tous concentrés sur le VIIe siècle. Ce sont en très grande majorité des personnages d’origine aisée voire noble (Charlemagne), souvent évêques ou papes (Claude, Éloi, Grégoire, Hubert) et/ou qui se sont retirés sur monde (Bavon, Claude, Fiacre). Du VIIe siècle date aussi l’apparition de la Vierge à Notre-Dame de Boulogne. La dernière période concerne les saints, largement minoritaires, que l’on peut qualifier de récents (XIe-XIVe siècles). On ne trouve plus d’évêques, mais le niveau social et le retrait du monde jouent encore visiblement un rôle important (Thibaut, François d’Assise, Louis IX, Roch). L’apparition de NotreDameà Liesse date du XIIe siècle. Choixiconographiques Le fait que la plupart des sujets figurés sur les boutons-enseignes soient connus pour des enseignes en plomb-étain souligne les rapports entretenus entre les deux catégories d’objets. La comparaison avec les corpus du Musée des Thermes de Cluny et de la rivière Sainte-Catherine àValenciennes permet d’établir une liste, évidemment non exhaustive, de correspondances 44 ;vingtquatre types sur soixante-dix-sept sont communs : pour le Christ, l’Annonciation, la Nativité, la Crucifixion, le Suaire de Lirey-Chambéry ; pour la Vierge, Notre Dame de Boulogne, Notre Dame de Liesse ; pour les saints, Claude, Éloi, Fiacre, Georges, Hubert, Jacques, Jean Baptiste, Martin, Mathurin, Michel, Nicolas, Pierre et Paul, Quentin, Sébastien, Servais ; pour les saintes, Barbe, Catherine, Véronique. Dans cette liste figurent certains des sujets iconographiques les plus fréquents sur les boutons-enseignes ce qui témoigne d’une continuité de la dévotion envers les saints les plus populaires du Moyen Âge. Iconographiquement, les continuités sont aussi fréquentes. D. Bruna a spécifiquement mis en évidence la continuité iconographique à propos d’un 7 bouton-enseigne au Saint Suaire rapproché d’une enseigne en plomb du musée de Cluny datée de 13501453 : « L’enseigne en bronze apparaît donc comme un souvenir de Chambéry, mais également comme un excellent exemple de transmissiondumodèle iconographique d’un sanctuaire à un autre » 45. Dans l’ensemble, les graveurs privilégient en effet les figurations classiques, la représentation traditionnelle du saint ou de ses attributs, parfois une scène de sa vie, son martyre ou un miracle 46. Aucun bouton-enseigne ne figure toutefois de reliquaire contrairement aux enseignes en plomb-étain (Jean Baptiste, Servais, etc.). Ainsi les continuités n’interdisent pas les originalités : si la plupart des boutons-enseignes utilisent des compositions proches des représentations des enseignes en plomb-étain, parfois avec de sensibles évolutions, d’autres diffèrent nettement. C’est le cas des enseignes de Jean Baptiste : si les enseignes de plomb datables du XIVe siècle figurent majoritairement la présentation du chef-reliquaire du saint 47, les boutons-enseignes favorisent une représentation en pied du saint soutenant l’agneau 48. Le même constat de continuités et de ruptures s’impose si l’on considère les types de légende : dans certains cas, tout à fait banalement, c’est le nom du saint, parfois accompagné du nom du sanctuaire où il est vénéré 49, qui sont cités mais le nom est aussi souvent inséré dans une invocation du type « Sancte/Sancta [nom du saint] ora pro me/nobis » sur laquelle nous reviendrons. Enfin, il faut rappeler que l’utilisation d’un métal et d’un système d’attache radicalement différents par rapports aux enseignes en plomb-étain témoigne plus d’une évolution technologique que d’une recherche de qualités esthétiques différentes : les alliages de plombétain et de bronze blanc imitent l’un et l’autre l’argent dont ils ont la couleur et la brillance 50. Entre continuités et innovations, les boutons-enseignes illustrent ainsi l’évolution tardo-médiévale des enseignes religieuses et permettent d’aborder la questiondel’évolution des pratiques religieuses. Pratiques et dévotions Les boutons-enseignes étaient-ils nécessairement vendus dans les sanctuaires où étaient vénérés les saints dont ils portaient l’image, à l’instar des enseignes de pèlerinage, ou, au contraire, simples objets personnels de dévotion, pouvaient-ils être achetés à peu près n’importe où au même titre que les médailles modernes ? Si la question doit nécessairement être posée, il est néanmoins réducteur de résumer le débat concernant la fonction des boutonsenseignes à une simple alternative. Il convient à présent de montrer, en se fondant sur l’étude du corpus lui-même, que les boutons-enseignes, tout comme la plupart des petits objets médiévaux de piété, illustrent la multiplicité des pratiques religieuses et des dévotions et ne peuvent être rangés sousaucuneétiquette prédéfinie. Un débat ancien Les auteurs de la fin du XIXe siècle et du début du XXe proposent spontanément, dans leur très grande majorité, d’identifier les boutonsenseignes à des souvenirs de pèlerinage qui auraient remplacé les anciennes enseignes en alliage de plomb 51. Cette thèse s’appuie à juste titre sur les légendes qui indiquent clairement un pèlerinage comme Vouvantes ¢ SAINCT + IVLIAM + DE + VOVANTE (catalogue 39) ¢ ou Boulogne-sur-Mer ¢ DE +BOVLONGNIE (19) (fig. 2, i-j) ¢, ainsi que sur les exemplaires qui représentent des reliques conservées dans un sanctuaire déterminé comme le Saint Suaire de Lirey-Chambéry (8) ou la sainteTunique deTrèves (63 et 72), et sur tous les phénomènes de continuité que nous avons relevés entre les enseignes de plomb et les boutons-enseignes. Ces arguments ont d’évidentes limites : ni l’argument iconographique, ni les représentations de reliques n’autorisent de conclusion sur les continuités fonctionnelles, et les légendes désignant un lieu ne concernent que deux types sur soixante-dix-sept ce qui rend très périlleuse toute tentative de généralisation. L’hypothèse d’insignes de corporation, parfois émise lorsqu’aucun pèlerinage majeur n’est connu pour le sujet représenté, exprime alors l’insatisfaction des chercheurs anciens pour cette théorie ; aujourd’hui comme alors, cette dernière hypothèse ne repose sur aucunepreuve concrète maisnepeut être rejetée 52. Il a été depuis reconnu que ce n’est qu’originellement, au XIIe siècle et, quoique moins nettement, au XIIIe siècle, que les enseignes (de plomb) sont indiscutablement liées à un lieu de culte et servent à attester la réalisation effective d’un pèlerinage, en plus d’être des amulettes prophylactiques et des symboles de piété. Progressivement, le statut premier de l’enseigne s’efface ; elle peut alors être achetée dans les sanctuaires sansquecela corresponde à une pratique de pèlerinage 53. Un même sanctuaire a même parfois pu produire plusieurs types d’enseignes en plomb-étain sans rapport immédiat avec le culte local, dans le but de répondre à la demande des pèlerins qui cherchaient à acquérir l’image de saints populaires 54. Il est évident qu’il faut, de la même manière, dissocier, au moins dans un premier temps, les boutons-enseignes des XVe et XVIe siècles de la pratiquedupèlerinage 55.Unepartieducorpus, qui comporte des types qui n’ont aucun 8 rapport ni avec un sanctuaire ni même avec une dévotion, rend ce changement de point de vue nécessaire : c’est le cas, entre autres, de la tentation d’Adam et Ève (1) et du bouton-enseigne, plus exceptionnel et explicitement laïc, dans lequel les armes du royaume de France et d’Anne de Bretagne apparaissent liées à un arbre (5) (fig. 2, f). La composition fait référence à l’union matrimoniale d’Anne de Bretagne avec Charles VIII en 1491 ou Louis XII en 1499 56 : cette enseigne assurerait donc une fonction commémorative, déjà attestée pour d’autres événements par certaines enseignes en plomb-étain 57 ou certains jetons, et ne peut pas être liée à un pèlerinage. L. Berton a par conséquent rapproché les boutonsenseignes d’autres catégories tardo-médiévales d’objets de piété et tout particulièrement des médailles en remettant en cause toute idée de lien entre les boutons-enseignes et les sanctuaires : À cette époque, l’enseigne n’était déjà plus nécessairement une preuve ou un souvenir de l’accomplissement d’un pèlerinage, chacun pouvant se procurer n’importe quelle enseigne auprès d’un bimbelotier ambulant, et la porter, à l’instar d’une médaille, pour se placer sous la bienveillante protection d’un saint ou d’une sainte 58. Aucune de ces deux hypothèses ne rend néanmoins compte de l’hétérogénéité du corpus des boutonsenseignes : l’alternative, on le voit, n’admet que trop peu de nuances. Il est donc nécessaire de déplacer le débat et de se poser la question, non de la fonction, mais bien des fonctions des boutonsenseignes, comme J. Evans, dès 1909, en avait eu l’intuition : But the question arises are all these badges pilgrims’ signs or are not some of them of the nature of personal amulets ? In what I shall have to say with regard to the larger number of representations of St. Barbara I shall point out the probability of both classes of objects being represented in the collection 59. Son idée naît de l’analyse même du corpus, de la variété des types et de leur fréquence. De fait, ce n’est pas de l’extérieur, par comparaison avec les enseignes en alliage de plomb ou les médailles, qu’il faut déterminer la fonction des boutons-enseignes, mais bien sur la base du corpus lui-même, autrement dit à partir de la typologie et de la fréquence des sujets représentés, et de son interprétation au regard de l’évolution des pratiques de dévotion à la fin du Moyen Âge. Les deux sujets sont en effet étroitement liés et il est impossible de séparer l’objet de son contexte culturel et spirituel. Cette approche permet de mettre en avant la multiplicité des dévotions qui soustendent la production des boutons-enseignes. Trois catégories peuvent être définies que nous allons étudier successivement : les saints thaumaturges, les saints « de proximité » associés à des pèlerinages régionaux et les saints universels non spécifiquement thaumaturges dont la dévotion, manifestement déconnectée d’un lieu de pèlerinage, est en raison de leur statut même plus délicate à aborder ; ces catégories ne sont ni exclusives (un même type peut figurer dans deux catégories), ni absolues, mais correspondent à des tendances majeures des pratiques religieuses tardo-médiévales. Le corpus des boutonsenseignes présente l’intérêt d’être cohérent chronologiquement et, comme nous le verrons, géographiquement et, à ce titre, se révèle particulièrement précieux pour analyser les pratiques de dévotion, par essence particulièrement difficiles à saisir, dans un espace chrono-géographique donné. Sainte Barbe et les saints thaumaturges Sainte Barbe est la sainte qui a livré le plus d’exemplaires de boutonsenseignes : quatre-vingts exemplaires, si l’on prend en compte ceux où elle apparaît associée à un autre personnage. Le cas de cette sainte à laquelle, à notre connaissance, aucun pèlerinage ne peut être associé, est exemplaire du statut et du contexte de diffusion des boutons-enseignes. Sa surreprésentation surprend mais s’accorde néanmoins avec le développement sans précédant que connaît le culte de la sainte au cours du XVe siècle, en Europe et notamment en Allemagne et dans le Nord de la France : les lieux de culte et les confréries placés sous son vocable se multiplient, elle est très fréquemment représentée dans l’iconographie, et pas moins de dix-huit Mystères traitant de sa légende sont connus 60. Sa popularité est expliquée par le fait qu’elle est censée préserver de la foudre et de la mort subite en général 61 : parce qu’elle protège de la « male mort », sans confession ni communion, les croyants ont eu de plus en plus fréquemment recours à son intercession 62. Un Livre d’Heures daté de 1490 contient la prière d’un dévot qui demande à Barbe « de le garder de foudre et de tempeste / comme de mort subite, vilaine et déshonneste / ainsi que Dieu lui a donné puissance » 63. La sainte, parce qu’elle l’a demandé avant de mourir, est en effet dotée du privilège de faire intercession pour ceux qui s’adressent à elle 64. C’est à ce titre qu’elle apparaît très fréquemment dans les Artes moriendi. Elle figure systématiquement au nombre des Quatorze Intercesseurs (dieVierzehn Nothelfer dits aussi « saints auxiliaires » ou « auxiliateurs ») dont le culte est né dans le sud de l’Allemagne mais ne 9 semble pas s’être diffusé en France au-delà de la Lorraine 65, et dans une autre liste de saints privilégiés transmise dans plusieurs Livres d’Heures français du XVe siècle et deux ballades d’Eustache Deschamps 66 : « Ils sont cinq sains, en la genealogie, / Et cinq sainctes, a qui Dieux octria / Benignement, a la fin de leur vie, / Que quiconques de cuer les requerra / En tous perilz, que Dieu essaucera / Leurs prieres, pour quelconque mesaise » 67. Sachant qu’aucun lieu de pèlerinage n’est particulièrement associé à sainte Barbe, il est très probable que la fréquence de sa représentation sur les boutons-enseignes soit lié à l’importance de son pouvoir d’intercession. Au-delà de ce cas particulier, ce ne sont pas moins de quinze saints et saintes auxiliaires notoires, spécialisés dans la guérison de diverses pathologies ou dans la protection de certains groupes de personnes, qui figurent sur les boutons-enseignes : Barbe, Catherine, Marguerite pour les saintes ; Christophe, Fiacre, Georges, Hubert, Jacques, Julien de Vouvantes, Julien l’Hospitalier,Martin, Mathurin, Nicolas,Roch, Sébastien pour les saints. Il est impossible de clore la liste tant le nombre des auxiliaires, auparavant très limité, explose littéralement entre le XIIIe et le XVe siècles, en même temps que le culte de ces Holy Helpers se diffuse dans tous les niveaux de la société 68. Théoriquement, bien qu’il y ait des « spécialistes », tout saint peut être convoqué pour soigner une maladie ou résoudre un problème quelconque. La ballade d’Eustache Deschamps est sur ce point particulièrement éloquente. Parmi les saints thaumaturges des boutons-enseignes, Barbe, Catherine, Marguerite, Christophe, Georges, Nicolas,Roch et Sébastien, auxquels il faut rajouter Antoine qui n’est pas particulièrement connu pour ses pouvoirs thaumaturgiques, figurent dans les listes d’auxiliaires, que ce soit dans la liste canonique des Vierzehn Nothelfer (Georges, Christophe, Barbe, Catherine et Marguerite), dans des variantes de cette liste (Antoine, Sébastien, Roch ou Nicolas) 69 ou dans la liste française (Barbe, Catherine, Marguerite, Christophe et Georges) 70. La tendance, illustrée dans ces différentes listes, à créer des groupes de saints partageant des pouvoirs similaires ou complémentaires est d’ailleurs tout à fait comparable à celle qui s’observe sur certains boutons-enseignes où Barbe et, moins souvent, Hélène et Véronique apparaissent en compagnie de Jacques, Nicolas, Sébastien ou la Vierge 71. On retrouve également fréquemment les mêmes saints guérisseurs dans les textes qui dénoncent ouvertement les pratiques superstitieuses de ceux qui accordent directement aux saints un pouvoir divin pour l’application duquel ils ne sont en théorie que les intermédiaires. Dans un sermon de 1518, Luther cite, entre vingt-deux saints, Antoine, Sébastien, Martin, Roch, Christophe, Anne, Barbe, Catherine et Marguerite. Avant lui, Jean Gerson évoque dans le De directione cordis, Christophe, Jean Baptiste, Hubert et Antoine 72. Il est inutile de faire la liste, qui n’est ni fixée ni fermée, des spécialités des saints que l’on retrouve sur les boutons-enseignes ; on compte cependant trois spécialistes de la peste (Christophe, Roch et Sébastien) et trois protecteurs des voyageurs (Christophe encore, Jacques et Julien l’Hospitalier). Ces concordances, si l’on considère la relative rareté de ces types, ne semblent en effet pas significatives 73. Plus généralement, les saints des boutons-enseignes semblent convoqués, au-delà d’une réputation de guérisseurs, pour leur pouvoir d’intercession en général. C’est le constat qui ressort des invocations formulaires que portent de nombreux exemplaires figurant des saints divers qui ne sont pas forcément connus pour leurs pouvoirs thaumaturgiques : Sancte/sancta [nom du saint ou de la sainte] ora pro me/nobis (sur les exemplaires figurant André, Antoine, Claude, Fiacre, Jacques, Nicolas, Quentin, Quirin, Simon, Barbe, Marguerite). Les exemplaires représentant la Vierge, intercesseur par excellence et très souvent figurée sur des boutons-enseignes sans doute pour cette raison, portent de façon récurrente la formule O Mater Dei, memento mei 74. La nature même de cette dévotion invite à dissocier les boutons-enseignes figurant ces personnages des centres de pèlerinage.Eneffet, le développement du culte des saints thaumaturges et intercesseurs s’est accompagné d’un déplacement progressif du lieu du miracle dont on trouve la trace dès le XIIIe siècle et qui devient très fréquent au siècle suivant : le déplacement du dévot dans le sanctuaire où sont conservées les reliques du saint devient conditionné par la réalisation du miracle et l’invocation peut avoir lieu à distance. André Vauchez associe cette évolution des pratiques à l’autonomisation et à la diffusion, dans les milieux populaires à partir du début du XVe siècle, des images des saints dont les boutons-enseignes ne constituent qu’un exemple 75 : En règle générale [...] la dévotion envers les saints tend à se distancier du culte des reliques, aux derniers siècles du Moyen Âge, même si, dans les voeux conditionnels, subsiste toujours une référence topographique concrète. Les pouvoirs des saints y gagnent en universalité, puisqu’ils sont moins liés que le passé à un lieu unique, celui où reposait 10 leur dépouille. Et surtout, la charge spirituelle du culte qui leur est rendu s’accroît, dans la mesure où leur action bénéfique ne s’exerce pas de façon automatique, mais à travers des relais ¢ l’image et la parole [...] 76 Au terme de cette évolution, l’image acquiert un pouvoir miraculeux autonome identique à celui des reliques, ce qui rend optionnel le pèlerinage dans le sanctuaire les contenant. Les boutons-enseignes s’inscrivent clairement dans cette évolution des pratiques de dévotion mais, pour d’autres types, l’hypothèse d’un lien avec un sanctuaire ne doit pas être d’emblée écartée lorsque celui-ci présente un rayonnement local ou régional bien attesté. Saints et sanctuaires régionaux Une approche géographique de la diffusion des boutons-enseignes permet de mettre en évidence la coïncidence entre la localisation des trouvailles et la carte de sanctuaires qui maintiennent, à la fin du Moyen Âge, des pèlerinages vivaces. Pour réaliser l’étude de la répartition des boutons-enseignes en fonction de leur lieu d’invention, un échantillon statistiquement valide était nécessaire. La commune d’invention étant quasi-systématiquement inconnue, nous avons choisi l’échelle du département. Sur les quatre cent douze exemplaires recensés, trois cent quatre-vingt-neuf ont été trouvés en France 77. La provenance de cent soixante-quatre exemplaires (39,81 %) est connue avec certitude et celle, hypothétique, de quatre-vingt-trois autres peut être reconstituée avec vraisemblance (20,15 %) 78. Le corpus utilisable s’élève ainsi à deux cent quarante-trois exemplaires (59,96 %). La carte de répartition des exemplaires découverts, que nous assimilerons à l’aire de diffusion des boutons-enseignes, est la suivante. FIG. 4. Répartition des trouvailles de boutons-enseignes. 1. trouvailles dont le lieu de découverte est connu avec certitude. 2 : trouvailles dont le lieu de découverte est connu avec certitude ou seulement probable. © lion1906.com / S. Cahanier. Mise à part une zone de concentration maximale légèrement plus étendue sur la deuxième carte, celle-ci livre les mêmes conclusions que la première : la très grande majorité des boutons-enseignes provient du quart nord-est de la France où une zone de concentration très nette apparaît entre la Champagne, la Bourgogne et l’Île-de-France. Le département de l’Yonne, avec dix-sept exemplaires (et trois de provenance hypothétique), en constitue l’épicentre, devant l’Aube (dix-sept exemplaires dont douze assurés), la Seine-et-Marne (treize exemplaires dont onze assurés) et la Haute-Marne (douze exemplaires dont huit assurés). Ces quatre départements concentrent 22,63 %des exemplaires localisés soit près du quart 79. On note à l’inverse de grands vides : la Bretagne et le Sud en général, notamment le Massif central, les Pyrénées et la Provence. La carte des sanctuaires dans lesquels la vénération aux saints du corpus est bien attestée à la fin du Moyen Âge se superpose presque exactement à cette zone de diffusion : en dehors des saints universels et, parmi eux, des saints auxiliaires, dont le culte n’est pas spécifiquement attaché à un lieu de pèlerinage (André, Barbe, Jacques le Majeur, Marie Madeleine 80, Michel 81, Paul, Pierre 82, Roch, etc.), un grand nombre des saints représentés sur les boutons-enseignes attirent par ailleurs parallèlement les pèlerins vers des sanctuaires concentrés dans la même aire géographique (nord-est de la France, Belgique, ouest de l’Allemagne actuels) 83 (fig. 5) : 11 • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • Antoine = Saint-Antoine-l’Abbaye (Isère) (1 sur la carte) ; Bavon = abbaye Saint-Bavon de Gand (Belgique) (2) ; Claude = monastère Saint-Claude de Saint-Oyand-de-Joux (Jura) (3) ; Éloi = cathédrale Saint-Éloi de Noyon (Oise) (4) ; Fiacre = prieuré de Saint-Fiacre-en-Brie (Seine-et-Marne) (5) ; Hubert = monastère de Saint-Hubert (Belgique) (6) ; Jean Baptiste = cathédrale d’Amiens (Somme) (7) plutôt que Saint-Jeand’Angély (Charente-Maritime) ; Julien de Vouvantes = Saint-Julien-de-Vouvantes (Loire-Atlantique) (8) ; Mansuy = cathédrale Saint-Étienne de Toul (Meurthe-et-Moselle) (9) ; Mathurin=basilique Saint-MathurindeLarchant (Seine-et-Marne) (10) ; Nicolas=basiliquedeSaint-Nicolas-de-Port(Meurthe-et-Moselle) (11) ; NotreDamedeBoulogne=Boulogne-sur-Mer(Pas-de-Calais) (12) ; Notre Dame de la Poterie = église Notre-Dame-de-la-Poterie, Bruges (Belgique) (13) ; NotreDamedeLiesse=égliseNotre-DamedeLiesse-Notre-Dame (Aisne) (14) ; NotreDameduMontRoland=sanctuairedumêmenomà Jouhe(Jura) (15) ; Quentin=abbayedeSaint-Quentin (Aisne) (16) ; Quirin = basilique Saint-Quirin de Neuss (Allemagne) ou abbatiale d’Ottmarsheim( Haut-Rhin)ouéglise Saint-MartindeLeernes (Belgique) (17 a-b-c) ; Servais=basiliquedeSaint-Servais à Maastricht(Pays-Bas) (18) ; Syre=Rilly-Sainte-Syre(Aube) (27) ; Thibaut de Provins = abbaye Saint-Pierre de Lagny-sur-Marne (Seine-et-Marne) ou abbaye Sainte-Colombe de Saint-Denis-lès-Sens(Yonne) (19 a-b). Il importe d’en distinguer le cas des saints dont le culte est beaucoup plus diffus, jusqu’à faire d’eux des saints universels, comme saint Michel, et le cas de certains objets vénérés comme des reliques. Néanmoins, il convient de ne pas ignorer, ici également, l’existence de sanctuaires qui contribuent à leur audience, dans la dévotion populaire, sur un plan régional : • • • • • • • Catherine=abbaye Sainte-Catherine-du-Mont àRouen(Seine-Maritime) (20) ; Georges=abbayedeFontenelle(Nord) (21) ; Hélène et sainte Croix = abbaye de Saint-Pierre d’Hautvillers (Marne) ou Trèves (Allemagne)oùse trouve la sainteTunique (22 a-b) ; Martin=basilique Saint-MartindeTours (Indre-et-Loire) (23) ; Sébastien=abbaye Saint-MédarddeSoissons (Aisne) (24) ; Suaire=chapelledeLirey(Aube) puisChambéryde1453à1562(Savoie) (25a-b) ; Véronique et sainteFace=monastèredeMontreuil-en-Thiérache(Aisne) (26). FIG. 5. Sanctuaires où sont attestées les dévotions représentées sur les boutons-enseignes. © d-maps.com / S. Cahanier. 12 La superposition des deux cartes (celle de la diffusion des boutonsenseignes et celle des sanctuaires) suggère bien la possibilité d’un rapport entre le succès des boutons-enseignes et l’attrait de ces sanctuaires régionaux. Dans plusieurs cas, des saints ou des objets de culte qui comptent parmi les mieux représentés dans le corpus des boutons-enseignes (Mathurin, Saint Suaire, Hubert, Jean Baptiste, Nicolas, Servais) contribuent aussi à la réputation de lieux de pèlerinage situés dans la zone géographique considérée. Il arrive même que la série d’exemplaires conservés et localisés soit suffisamment fournie pour autoriser la réalisation de cartes de répartition où s’impose avec évidence le constat de la proximité entre les lieux de trouvailles et un sanctuaire local 84. Les nombreux exemplaires représentant saint Mathurin, le type le plus fréquent après sainte Barbe, proviennent dans leur très grande majorité des environs de la basilique de Larchant (fig. 6) 85. Cette concentration des trouvailles concernant un saint typiquement local suggère une acquisition directe des boutons-enseignes sur le lieu de culte. Cet achat n’est cependant pas forcément lié à un pèlerinage, promis ou réalisé : les boutons peuvent être achetés sur place à l’occasion d’un pèlerinage mais aussi d’une simple visite au sanctuaire, ils peuvent être offerts ou légués. Le même lien entre sanctuaire et diffusion des boutons-enseignes paraît plausible, tout en étant moins sûr car le nombre d’exemplaires est plus limité, pour saint Nicolas (autour de l’abbaye Saint-Nicolas-de-Port) (fig. 6) 86 et saint Hubert (départements voisins de l’abbaye Saint-Hubert en Belgique). FIG. 6. Répartition des trouvailles de boutons-enseignes représentant saint Mathurin (1) et saint Nicolas (2). © lion1906.com / S. Cahanier. D’autres arguments en faveur de ce rôle des dévotions régionales dans le succès qu’ont connu les boutonsenseignes peuvent encore être avancés. Bien qu’aucun lieu de pèlerinage particulier ne puisse être associé à des saints comme Corneille ou Christophe, eux aussi attestés dans le corpus des boutonsenseignes, leur popularité dans le nord de la France et en Belgique est indéniable. Dans d’autres cas, cette influence a d’ailleurs pu s’exercer à la manière d’ondes concentriques à partir de sanctuaires plus éloignés, mais néanmoins relativement accessibles aux habitants du nord et du nord-est de la France, tels Saint-Antoinel’Abbaye pour le culte de saint Antoine, Saint-Claude de Saint-Oyand-de-Joux pour celui de saint Claude, Chambéry pour celui du Saint Suaire. Qu’une relation intrinsèque fasse dépendre le succès des boutonsenseignes de la fréquentation des sanctuaires régionaux, ou que ces manifestations distinctes de la dévotion aux saints régionaux soient simplement concomitantes, il importe au moins de reconnaître la valeur de témoignage des boutons-enseignes au regard de l’intensité nouvelle qu’acquiert à la fin du Moyen Âge la dévotion pour des saints locaux devenus en même temps, à tous égards, familiers. Comme l’a écrit D. Bruna : À la fin du Moyen Âge, la dimension locale du pèlerinage traduit une inclination de la population en faveur des saints locaux. [...] Les sanctuaires locaux se sont développés ou ont connu une plus grande faveur des fidèles. [...] Mais ces lieux saints ne se sont en aucun cas substitués aux grands centres de pèlerinage : ceux-ci ont cohabité avec ceux-là de façon complémentaire. Si le pèlerinage dans les contrées lointaines drainait le plus souvent sur les routes des aventuriers, des hommes et des femmes aisés, le pèlerinage local s’adressait notamment à une catégorie plus modeste de pèlerins. D’importance mineure à l’aune des kilomètres parcourus, le pèlerinage local se limite à une visite, une excursion d’un jour ou parfois même de quelques heures. L’expérience est même renouvelée au fil de la vie tant ces lieux sont familiers et accessibles. Ils abritent pour la plupart les restes d’un saint que l’on connaît, en qui l’on a confiance, que l’on invoque à tout moment et dont on porte parfois le nom 87. 13 Saints universels Par contraste, on observe pour d’autres types un net décalage entre la zone de trouvaille des exemplaires et le sanctuaire correspondant. Les cartes de répartition des exemplaires représentant des saints dits « universels », la Vierge, ou encore les scènes de la vie du Christ 88 montrent une diffusion homogène sans zone de concentration particulière comme pour les saints thaumaturges dont le culte s’est généralisé. Le cas de saint Michel est exemplaire : tous les boutons-enseignes connus proviennent du sud et de l’est de la région parisienne mais aucun n’a été trouvé dans les départements limitrophes du Mont-Saint-Michel où la production d’enseignes en plomb est pourtant attestée par les fouilles archéologiques. Le cas du Saint Suaire est également intéressant : bien que quatre exemplaires (dont un douteux) aient été découverts en Haute-Savoie et dans les Hautes-Alpes, à proximité du sanctuaire de Chambéry, la carte de répartition demeure très diffuse. Cette situation confirme la place qui revient, dans le répertoire des boutonsenseignes, au saint invoqué hors des lieux de culte, comme on l’a montré pour les saints thaumaturges, parce que l’image du saint peut elle-même accomplir des miracles et protéger le porteur tel un « talisman », rôle que les médailles pieuses ont conservé. Ces études de cas mettent ainsi en évidence que les boutons-enseignes répondent à une demande multiple et à des pratiques variées qui seules peuvent expliquer la pluralité des sujets iconographiques. Certains types, comme leurs ancêtres en plomb-étain, sont manifestement vendus dans les sanctuaires aux dévots de passage et le lien avec un pèlerinage réellement effectué peut exister, sans être nécessaire (Mathurin). La possession de l’image du saint n’est toutefois plus subordonnée à la visite du sanctuaire. Dans la plupart des cas, les boutons-enseignes sont produits indépendamment de tout pèlerinage pour être vendus à des fidèles qui désirent acheter l’image d’un saint dont on recherche tout particulièrement la protection, qu’il ait une réputation de thaumaturge, d’intercesseur, qu’il s’agisse d’un saint universel sans spécialisation avérée ou d’un saint local dont on se sent proche. Les boutons sur lesquels apparaissent plusieurs figures, souvent des saints très populaires (Barbe, Jacques) ou la Vierge, ou un saint populaire et un saint faisant potentiellement l’objet d’une dévotion locale (Hélène, Nicolas), illustrent la superposition et le croisement de ces différentes pratiques qui, loin de s’opposer, se complètent. Les mêmes ateliers produisaient probablement une pluralité d’enseignes pour les vendre au sein des mêmes échoppes. Cette évolution des pratiques tardo-médiévales qu’illustrent les boutons-enseignes a été mise en avant par D. Bruna qui a rappelé d’une part que l’enseigne, qu’elle ait ou non à l’origine été un souvenir de pèlerinage, avait tendance à devenir un objet personnel et à faire l’objet d’une dévotion propre 89, et d’autre part que les sanctuaires, à la fin du Moyen Âge, ont commencé à produire des enseignes des saints les plus populaires indépendamment de leur pèlerinage principal pour répondre à une demande plus diversifiée 90 : L’étude de l’iconographie du pèlerin du XVe siècle révèle que ce voyageur pouvait orner son chapeau de près d’une dizaine d’enseignes, alors que le pèlerin du XIIe et XIIIe siècle se contentait souvent d’un seul insigne. Le pèlerin de la fin du Moyen Âge est davantage un collectionneur d’objets. Les boutons-enseignes illustrent ainsi parfaitement l’évolution des mentalités et des pratiques déjà connue pour les enseignes en plomb-étain et semblent même marquer une accentuation de ces tendances. Leur datation permet de compter les boutons-enseignes au nombre des dernières enseignes médiévales connues 91 quelques décennies avant l’apparition des premières médailles pieuses. S’il est sans doute excessif de considérer qu’ils opèrent la transition entre les enseignes en plomb-étain et les médailles pieuses 92, il est certain que leur diversité témoigne de l’évolution des pratiques et des mentalités religieuses à la fin du Moyen Âge. La taille plus réduite, la forme plus géométrique ou encore l’utilisation d’un alliage cuivreux préfigurent de fait les médailles. Mais parce qu’il est cousu au vêtement et non suspendu à une chaîne, le bouton-enseigne est néanmoins encore pleinement une enseigne médiévale. Il constitue une des dernières catégories d’enseignes qu’il convient de replacer dans la profusion des nouvelles formes d’objets de dévotion qui, des enseignes en métal estampé aux gravures imprimées, fleurissent entre le XVe et le XVIe siècle dans l’Occident chrétien. Une pratique régionale La découverte des boutons-enseignes dans un espace géographique relativement restreint (le nord et le nord-est de la France et les pays limitrophes), tout comme la superposition de cette carte de répartition avec les dévotions régionales et les sanctuaires locaux vivants à la fin du Moyen Âge, sont des arguments qui 14 invitent à faire de ces objets une pratique régionale particulière, limitée dans le temps mais aussi dans l’espace. L’absence de boutons-enseignes autour d’autres sanctuaires français où la production d’enseignes en plomb-étain est attestée tout au long du Moyen Âge et à une époque immédiatement antérieure voire contemporaine de celle de leur diffusion (l’exemple le plus clair, car attesté par l’archéologie, étant celui du Mont-Saint-Michel 93), est un argument supplémentaire : aucune découverte de bouton-enseigne n’a de même été signalée, à notre connaissance, à proximité des grands centres de pèlerinage à rayonnement international (Rome, Saint-Jacques-de-Compostelle ou Jérusalem). De fait, la diffusion des boutonsenseignes n’a jamais atteint celle des enseignes en plomb-étain, produites et répandues un peu partout en Europe occidentale et centrale 94. Ces éléments laissent entrevoir une pratique, et par conséquent une demande, locales et soulèvent la question de la production. J. Evans remarquait que la proximité stylistique de plusieurs exemplaires laissait suspecter le travail d’une même main 95. Il est hautement probable en effet, comme nous l’avons vu, que le même artiste ou atelier produisait plusieurs modèles répondant à une demande variée. Les ateliers étaient-ils nombreux ou faut-il au contraire considérer qu’une poignée d’entre eux se partageaient la production ? Ces ateliers étaient-ils liés aux sanctuaires (quand le bouton-enseigne témoigne d’une dévotion liée à un centre de pèlerinage) ou étaient-ils indépendants et fonctionnaient-ils par commande ? En l’absence de découverte archéologique, notamment de moule, il convient de rester extrêmement prudent sur ces questions. Sur la base de la carte de répartition des trouvailles, on peut suspecter une production proche des lieux d’invention. Il est peu probable en effet que des boutons-enseignes aient été produits dans des régions où aucun exemplaire n’a été découvert. Il est tout aussi probable que la production des boutons-enseignes soit due à une multiplicité d’ateliers localisés, au moins pour une partie d’entre eux, à proximité des centres de pèlerinagecommepour les enseignes en plomb-étain. La fréquence et la concentration des enseignes de saint Mathurin permettent de supposer l’existence très probable de l’un d’entre eux à Larchant. D’autres ont certainement existé autour de certains des sanctuaires dont nous avons donné la liste. Cependant, s’il est possible, comme nous allons à présent le voir, d’entrevoir le fonctionnement de ces ateliers, il demeure pour le moment impossible de les localiser de manière affirmative. Il faut conclure, avec undegré de probabilité satisfaisant mais sans plus de précision, que les boutonsenseignes constituent une réponse régionale à la demande générée par le développement de pratiques de dévotion particulières à la fin du Moyen Âge : saints protecteurs et thaumaturges, saints de proximité, saints universels. Dans l’atelier du « faiseur d’enseignes » : inspiration, diffusion et variation des modèles Si les pratiques religieuses liées à la possession des enseignes tendent à être mieux appréhendées, à l’autre bout de la chaîne, la question de la production des enseignes de pèlerinage demeure un domaine très mal connu, en raison notamment de la rareté des sources aussi bien textuelles qu’archéologiques. Si les découvertes récentes, comme l’atelier de « faiseurs d’enseignes » au Mont-Saint-Michel dont l’étude est parue en 2016 96, associées aux textes d’archives, permettent de retracer les grands traits de leur fonctionnement 97, de nombreux points demeurent cependant à élucider, notamment sur les sources d’inspiration. L’établissement d’un corpus large et diversifié, mais en même temps restreint à une production limitée dans le temps et l’espace, permet d’éclaircir certains points de cette problématique dans le cas particulier des boutons-enseignes. Comme l’avait souligné J. Evans au début du XXe siècle, les productions des différents ateliers présentent un tel degré d’homogénéité qu’il faut bien supposer des contacts étroits entre eux : l’utilisation de ces techniques particulièrement originales que sont le recours au bronze et l’attache de type bouton, tout comme de nombreux critères stylistiques, prouvent en effet que nous sommes en présence d’un patron technologique cohérent qui s’est diffusé d’atelier en atelier. De fait, seul l’échange des modèles et des techniques entre les différents centres religieux peut expliquer l’homogénéité de la production. L’étude iconographique précise des boutonsenseignes pourrait ainsi permettre de se faire une idée de la façon dont les graveurs trouvaient leur inspiration et des jeux d’influence exercés entre les différents ateliers de « faiseurs d’enseignes » qui en viennent à former un véritable réseau partageant aussi bien les techniques que les modèles iconographiques. Cette étude, qui ne peut que se fonder sur une comparaison précise de l’ensemble des moules recensés, fournirait à elle seule la matière d’un article. Sans prétendre à l’exhaustivité, nous nous contenterons ici de présenter, en guise d’illustration, certains moules qui offrent une grande similitude dans le dessin que seuls la copie directe ou l’emploi d’un même schéma de base adapté de plusieurs façons différentes pour deux saints distincts peuvent expliquer. 15 FIG. 7. ¢ Échantillon de boutons-enseignes comparables (l’échelle n’est pas respectée) : dans le traitement de la figure du saint : a et b : Nicolas (no 46) et Servais (no 52 var. 2) ; c, d et e : Mansuy (no 42), Nicolas (no 46) et Claude (no 29) ; dans le traitement de la légende : f et g : Claude (no 29) et Barbe (no 61). © S. Cahanier (dessins a-e) et C. Bellenger (dessins f-g). Les deux premiers modèles, figurant Nicolas et Servais (fig. 7, a-b), présentent à la fois de grandes similitudes dans la représentation et la posture des personnages (visage imberbe, mitre, crosse, plis du costume) et dans le décor (même ville schématique). Seuls varient les gestes des mains et les attributs ; ces derniers semblent surajoutés sur le modèle de Servais puisque le pli du tissu que Nicolas retient dans sa main, caché par le livre, semble n’y être soutenu par rien. Deux autres modèles, de Nicolas encore et de Mansuy (fig. 5, c-d), outre une composition similaire, présentent des personnages identiques en tout point, et seuls la légende et les personnages secondaires (le saloir pour Nicolas et l’enfant noyé pour Mansuy) permettent de les identifier. Le modèle de Mansuy se démarque aussi par une plus grande finesse. On notera que la proximité de ces deux modèles peut être liée à la proximité des récits hagiographiques : il s’agit dans les deux cas de résurrections d’enfants par un saint évêque. Un troisième modèle, de Claude cette fois (fig. 5, e), présente le même personnage, mais symétriquement inversé. Cette inversion en miroir est un phénomène fréquent qui se produit lorsque le graveur copie un modèle dans une matrice sans opérer de transformation de ce qu’il voit, ce qui a pour effet d’inverser l’image lors du coulage de l’objet. Le processus de copie ou d’inspiration ici mis en évidence peut ailleurs porter sur la légende et non sur le personnage, comme dans le cas de deux boutons-enseignes de Barbe et Claude (fig. 5, f-g) où le bandeau et la graphie (lettres épatées, A sans barre) sont identiques. Les convergences fréquentes entre différents moules peuvent avoir plusieurs sources : soit un nouveau type était réalisé à partir d’un modèle précédent, légèrement modifié, issu du même atelier, ce qui génère une très grande proximité stylistique puisque la même main est responsable des deux modèles (c’est sans doute le cas pour le dernier exemple), soit les types étaient copiés dans un atelier d’après une enseigne provenant d’un autre atelier. Il est également possible, si les différents moules comparables doivent être attribués à un seul atelier, que le graveur ait utilisé un patron fixe adapté aux différents personnages représentés par l’ajout d’attributs, des variations de la posture des mains, de la forme de la croix ou de la crosse des évêques, ou encore par l’ajout d’éléments de contexte ou de décors (fig. 5, a-b et c-d). Une organisation hiérarchique associant des maîtres-graveurs réalisant les modèles (ou uniquement les personnages) et des apprentis chargés de les copier (ou de remplir le champ autour des personnages) est possible mais elle doit être confirmée par une étude plus complète. Quels étaient les modèles ? Étaient-ils issus de l’imagination du graveur ou s’inspiraient-ils d’images préexistantes ? Bien que la composition iconographique des boutons-enseignes reprenne parfois celle des enseignes en plomb-étain, le style est dans chaque cas trop éloigné pour que l’on puisse déduire que les premières s’inspirent des secondes. Faut-il alors chercher du côté de la statuaire, des reliquaires ou encore des sceaux ecclésiastiques 98 ? Jusqu’à présent, nous n’avons trouvé aucun parallèle probant. Le rapprochement avec les images de colporteurs, les estampes et plus encore les gravures des incunables, qui partagent avec les boutons-enseignes le même principe de la sérialité en raison de l’utilisation de patrons 16 fixes 99, pourrait s’avérer plus fructueux. Dans la mesure où le développement de l’imprimerie a permis aux gravures pieuses de circuler largement, donc de diffuser les modèles, il est tentant de chercher sur ces supports la source iconographique des boutons-enseignes ; les livres d’heures imprimés, notamment, présentent souvent des séries de gravures largement comparables à celles des boutons-enseignes 100. Avant de conclure, nous voudrions présenter le cas de sainte Barbe car le grand nombre de moules qui la représentent, trente-sept à ce jour, permet d’illustrer la façon dont les graveurs faisaient varier l’image d’un même personnage. Barbe est toujours représentée de la même façon, sans exception : en pied, vêtue d’un long manteau drapé qui pend jusqu’au sol, elle tient dans une main un livre et dans l’autre la palme du martyre ; derrière elle se trouve la tour de sa légende. De nombreux détails varient, comme le drapé de l’habit de la sainte, certains accessoires vestimentaires, la position respective du livre et de la palme, l’orientation de cette dernière (tournée à droite ou à gauche), la forme de la tour et la place qu’elle occupe, à droite ou à gauche de la sainte. Malgré cette diversité, qui permet théoriquement d’infinies variations, la comparaison des moules met en évidence que seule six images différentes de Barbe (numérotées I à VI sur la figure 8) ont été utilisées et onze images de la tour (numérotées i à xi) ; les autres variantes sont seulement minimes et liées au processus de copie plus ou moins habile, répété plusieurs fois de suite 101. L’emploi d’images différentes pour Barbe et sa tour permet de multiplier les combinaisons et ainsi de faire largement varier les représentations mais là encore, sur les soixante-six combinaisons théoriquement possibles, seules quatorze sont attestées à ce jour ; ce sont les « familles » de moules A à N sur la figure 8 (A correspond aux moules utilisant l’image I de Barbe et l’image i de la tour, etc.). Le phénomène de copie provoque donc une (relative) pauvreté iconographique en limitant les représentations originales. Ceci est d’autant plus manifeste que sur quatorze combinaisons, seules trois (B,FetK) sont très fréquentes avec six ou sept moules. À l’inverse, sept combinaisons ne sont connues que par un moule. Sur le schéma chaque moule est identifié par une lettre minuscule correspondant à la forme (fig. 3) et par un numéro d’inventaire (a01 est le premier moule recensé pour la forme A, a02, le deuxième, etc.) 102. FIG. 8. ¢ Restitution des 14 familles de moules (lettres capitales, de A à N) ayant servi de matrice à la production des boutonsenseignes du corpus où apparaît l’image de sainte Barbe. Cette image combine une figure de femme (six variantes : chiffres romains en grandes capitales, de I à VI) et le dessin d’une tour (onze représentations différentes : chiffres romains en minuscules, de i à xi). Chaque moule théorique est pourvu d’un numéro d’inventaire (lettre minuscule, correspondant à la forme de l’enseigne, suivie d’un chiffre) permettant le classement en séries. Le schéma permet de mettre en évidence un premier groupe de combinaisons ou familles (A-J) qui utilise de manière croisée trois images de Barbe (I-III) et sept images de la tour (i-vii). Il est ainsi possible d’affirmer qu’il existe, entre les vingt-six moules ainsi regroupés, des rapports de copie ou une source d’inspiration commune partielle ou totale. C’est là la marque d’un atelier particulier ou d’un groupe d’ateliers se copiant les uns les autres ou entretenant des relations. Le nombre de moules est élevé et souligne l’importance, dans la production des enseignes, de la reprise de représentations préexistantes : le graveur travaille presque toujours sur modèle, voire copie un bouton-enseigne qu’il a sous les yeux, et rares sont les cas de pure originalité. Seuls les moules correspondant aux familles M et N semblent à l’inverse isolés. Il s’agit de deux moules au style très particulier (a15) voire très maladroit (a04) que l’on peut sans doute considérer comme des tentatives originales d’un graveur ou d’un apprenti mais dont le résultat n’est 17 pas toujours à la hauteur du reste de la production. Les familles K et L, pour finir, forment un groupe à part qui utilise des images spécifiques (IV et viii-ix), entièrement différentes de celles du groupe A-J, mais qui a livré proportionnellement beaucoup de matrices (sept). Ce pourrait être l’indice d’un atelier distinct, qui n’aurait pas copié les boutons du premier groupe que nous avons défini. La découverte d’un nouveau moule pourra toutefois remettre en question à tout moment l’organisation que nous proposons ici à partir du corpus connu 103. Conclusion Le nom vernaculaire donné aux boutons-enseignes par leurs fabricants et leurs possesseurs demeure inconnu ; il nous est dès lors impossible de dire si cette catégorie d’enseignes était distinguée, par le lexique, des enseignes en plomb-étain, ou si le rapport avec les boutons de costume était conscient. Il est cependant possible que ces objets se cachent derrière le terme « enseigne » dans certains écrits 104. Ils correspondent à une catégorie originale d’enseignes de pèlerinage et d’images pieuses, dont la diffusion, au vu des trouvailles, est bien attestée dans le nord-est de la France entre la fin du XVe siècle et ledébut du XVIe. Cette production éphémère nous permet d’entrevoir à des degrés de précision divers le fonctionnement des ateliers, leurs sources, leurs choix iconographiques, leurs relations, les modes de diffusion des enseignes, mais aussi de lever en partie le voile sur les demandes et les attentes des acheteurs. Il nous plonge en somme au coeur des pratiques religieuses de ce que Johan Huizinga a très justement appelé « l’automne du Moyen Âge » 105. Succédant souvent à des enseignes en plomb voire cohabitant probablement avec elles, les boutons-enseignes sont ainsi l’expression originale et techniquement aboutie d’un type d’objet ¢ l’enseigne religieuse en métal ¢, sur le point de disparaître pour être remplacé par les médailles et les images pieuses. Cherchant à répondre à une demande qui a évolué (images de saints populaires, qu’ils aient une réputation de thaumaturge ou non, et images de saints familiers dont les sanctuaires sont proches sans forcément s’y rendre), ils manifestent peut-être aussi, par la volonté de renouveler le style et les méthodes de fabrication, une réponse à la perte de popularité des enseignes en plomb qui conduira à leur disparition rapide dans les premières décennies du XVIe siècle. Simon CAHANIER Université Jean Moulin, Lyon 3 ANNEXE CATALOGUE DÉTAILLÉ DES TYPES DE BOUTONS-ENSEIGNES RECENSÉS Les tableaux suivants indiquent, en reprenant l’ordre de classement établi cidessus, la description de chacun des soixante-dix-sept types de boutons-enseignes recensés. Pour chaque type, nous avons précisé les différentes formes de bouton connues (F), le nombre d’exemplaires recensés (NE) et enfin le nombre minimum de moules d’enseignes (NM) ; ce dernier a été reconstitué sur la base de la comparaison de l’ensemble des exemplaires connus pour un même type. Si deux moules différents peuvent parfois être très proches et ne se distinguer que par des différences minimes de gravure, le même sujet peut au contraire avoir été traité de façon très différente d’un moule à l’autre. L’examen des pièces de notre corpus nous permet d’induire l’existence d’au moins deux cent vingt moules. Seules les variantes iconographiques majeures (Michel saurochtone et Michel pesant les âmes, par exemple) sont distinguées au sein de chaque type concerné. Les légendes sont en latin pour les prières ; elles sont parfois en français pour la simple identification du personnage ou de la scène 1. Elles ont été retranscrites exactement avec en note, lorsque cela s’imposait pour les légendes latines, la correspondance selon les normes du latin classique. Ancien Testament Type Description F 1. Adam et Ève (frg.2) Adam et Ève, nus. Entre eux, l’arbre de A la connaissance se termine sous la forme d’un dragon à tête humaine dont les bras sont des branches. 18 NE NM 1 1 Christ. Scènes narratives 2. Annonciation Marie, agenouillée, lit ; elle reçoit la visite de l’archange Gabriel derrière elle à droite. Les premiers mots de la salutation angélique apparaissent dans un phylactère qui s’élève des mains de Gabriel : AVE . GRACIA 3. 3. Nativité Marie, à gauche, et Joseph, à droite, dans l’étable, de part et d’autre de la mangeoire où se trouve l’enfant Jésus. Bœuf et âne derrière eux. Un berger observe la scène par la fenêtre. 4. Crucifixion Marie et Jean de part et d’autre du Christ en croix. Au dessus de sa tête, le titulus portant l’inscription INRI parfois flanqué du soleil et de la lune. Au pied de la croix, parfois, un crâne et un tibia. 5. Christ et Marie Marie-Madeleine, assise, vêtue d’un Madeleine ou Noli me épais manteau et tenant un flacon de parfum, regarde le Christ ressuscité à tangere droite. Celui-ci, debout, tend la main pour arrêter l’élan de la femme qui veut se lever. Il tient une bêche de la main gauche et porte les stigmates de la crucifixion. Entre eux, un arbre bien taillé ; à son pied, une fleur de lis. B 1 1 B 2 1 A, B, D 16 11 A 3 1 B 2 2 A, B 5 3 A, B 23 7 A 3 2 Vierge à l’enfant couronnée, assise sur A un trône flanqué de deux anges tenant des chandeliers. À ses pieds, un enfant emmailloté. B Vierge à l’enfant en costume XVIe siècle très réaliste. Légende : O . 1 1 1 1 1 1 2 2 2 1 Christ. Emblèmes 6. Exaltation de la Croix Deux anges présentent la Croix sur laquelle sont visibles le titulus, les clous de la Passion et la couronne d’épines. 7. IHS Grand « IHS » calligraphié sur un fond quadrillé. 8. Suaire de LireyTrois évêques présentent le Suaire sur Chambéry. lequel apparaît le corps du Christ de face, ou de face et de dos, les mains croisées. Légende : LE . SVAIRE . DE . IHS ou S . SVAIRE. 9. Sainte Face / Voile Voile de Véronique sur lequel s’est de Véronique ou imprimée la face du Christ barbu, tête mandylion nue et en gloire. Légende : ADORAMVT + TE + CRISTE + BENEDICIMVT + STE 4. Vierge 10. Vierge à l’enfant indéterminée 1 11. Vierge à l’enfant indéterminée 2 MATER . DEI + MEMANTO . ME 5. 12. Vierge à l’enfant indéterminée 3 13. Vierge à l’enfant indéterminée 4 (frg.) 14. Vierge à l’enfant indéterminée 5 Vierge à l’enfant trônant et couronnée G de face. L’enfant tient un globe. Vierge à l’enfant trônant, l’enfant Jésus D est assis sur un pupitre (?) à gauche. À droite, élément manquant. Vierge à l’enfant assise sur un large A socle de pierre (?). Elle soutient l’enfant Jésus et un livre. Légende : O . MATER . DEI . MEMANTO . ME. 19 15. Vierge à l’enfant indéterminée 6 Vierge à l’enfant debout à gauche. Autour d’elle, décors floraux. Le tout dans une couronne florale. 16. ND des sept La Vierge, agenouillée, tient les mains douleurs jointes sur sa poitrine transpercée de sept épées. Devant elle, une fleur. 17. Pietà Au premier plan, Marie soutient le accompagnée des corps du Christ. Derrière eux, croix du Arma Christi supplice entourée de deux croix en Tau ; les trois croix supportent les instruments de la Passion, parmi lesquels des fléaux, la couronne d’épines, la lance, l’éponge au bout de la lance. 18. Vierge en gloire / Vierge à l’enfant, couronnée ou tête Vierge de nue, nimbée du soleil, un croissant de l’apocalypse lune à ses pieds. L’enfant peut tenir une fleur ou un globe terrestre. Légende : O + MATER + DEI + MEMANTO + MEI. 19. ND de Boulogne Vierge à l’enfant dans une nef sur la mer. Légende : + O . MATER . DEI . MEMANTO . ME ou DE + BOVLONGNIE 6. 20. ND de Liesse Vierge noire de Liesse sur un trône. Devant elle, l’enfant Jésus les bras ouverts. De part et d’autre, deux autres saintes à l’enfant. Légende : LIES ou LIENSE. 21. ND du Mont Vierge à l’enfant trônante et Roland couronnée. À droite, un personnage (nu ?) tenant une croix de procession, court dans sa direction. Légende : NOTRE DAME DU MONT ROLANT. 22. ND de la Poterie ? Vierge à l’enfant debout de face. Arrière-plan en damier pouvant évoquer la corporation de l’hôpital de Notre-Dame-de-la-Poterie 7. A 1 1 A 1 1 A 1 1 A, B 13 8 23. André A, B, G 6 4 A 3 2 A 1 1 G 2 1 A, B 11 6 A, B 10 4 B 1 1 A 1 1 Saints 24. Antoine 25. Bavon de Gand 26. Corneille André, debout, tient la croix de son supplice dans la main gauche et un livre dans la droite. Légende : S ANDREA ORA PRO NOBIS ou S + ANDREA ou S/A. Antoine debout en moine. Il peut être accompagné de plusieurs attributs : livre, chapelet, cloche, tau, cochon. Sur une variante, il repousse le diable. Légende : S/A ou SARITE + ANON’ + ORA + PRO + ME 8. Bavon, vêtu en noble, tient un faucon posé sur la main gauche ; sa main droite est plongée dans une escarcelle. Au second plan, une tour surmontée d’une cloche et une ville (Gand ?). Corneille, debout de face, en pape, tient une croix de procession et un cor de chasse qui rappelle son nom. À sa gauche, un homme en prière ; à sa droite, un autre personnage, peut-être un paralytique. 20 27. Charlemagne 28. Christophe 29. Claude 30. Éloi de Noyon 10 31. Étienne 32. Fiacre 33. François 34. Georges 35. Grégoire le Grand (frg.) 36. Hubert de Liège 37. Jacques le Majeur Charlemagne, debout à gauche, coiffé de la couronne impériale et auréolé, en habit militaire, tient une épée dans la main gauche et un globe dans la droite. Écu à l’aigle bicéphale. Christophe, en pèlerin, courbé, s’aide de son bâton pour porter sur son dos à travers le fleuve le Christ enfant qui tient un globe. Sur une des deux rives, l’ermite de la légende tend une lanterne. Claude, debout, en évêque, tient une croix de procession et parfois un livre. Légende : S . CLAVDI . ORA . PRO . NOBIS ou S . CLAVDE . ORA . PRO . NOBIS ou + SANCTE + CLAVDI ou S/C 9. Variante 1. Éloi, debout, en évêque, tient une croix de procession et un livre. Légende : S/E. Variante 2. Éloi, à gauche, façonne un fer à cheval en le frappant sur une enclume ; derrière lui un fer chauffe sur une forge ; d’autres fers sont accrochés au mur. Étienne, debout en diacre, vêtu de la dalmatique tient la palme du martyre et un livre. Légende : SANCTE + STEPHANE. Fiacre, en moine, debout, tient une bêche dans la main gauche et un livre dans la droite. Légende : S + FIACRI + ORA + PRO + NOBIS. Saint François d’Assise, en moine, ploie le genou ; il reçoit les stigmates d’un Christ en croix porté par un ange. Légende : + [SANCT]E + FRAN+CICE + 11. Georges, en chevalier et à cheval, transperce de sa lance le dragon qui se tord sur le sol. La princesse de la légende est en prière devant lui et le couple royal dans un château schématique à l’arrière. Messe de saint Grégoire. Le pape, tête nue mais auréolée, à genoux, célèbre la messe devant un autel sur lequel est posé un livre et où apparaît le Christ de douleur (non conservé). Un acolyte tient son manteau et un cierge. Variante 1. Hubert, à cheval à droite, souffle dans un cor de chasse et poursuit le cerf crucifère ; un chien sous les pattes du cheval et un ange tendant une étoffe dans le ciel. Légende : S + HVMBER ou S. HVMBERT. Variante 2. Hubert, en prière au pied de son cheval, face au cerf, parfois accompagné d’un second personnage et/ou d’un chien. Variante 1. Jacques debout, tenant son bourdon et un livre, en pèlerin. Légende : [S] + JACOB[E +] ORA + PRO + NOBIS ou + SANCTE + IACOBE. Variante 2. Le même, assis encadré de deux personnages en prière. Légende : S/J. 21 A 1 1 B 1 1 A, B 12 7 A, E 4 2 B 1 1 A 1 1 B 4 1 A 1 1 B, H (?) 5 3 A 1 1 A, B 9 3 A, B, D, 8 E 4 A, B, D 4 4 A 3 1 38. Jean Baptiste 39. Julien de Vouvantes Variante 1. Jean Baptiste, debout à A, B droite, tient l’agneau pascal. Variante 2. Hérode à droite livrant la A tête du saint à Salomé à gauche. Légende : ECCE CAPV + S + IOHANIS + BATISTE + IVDISCO 12. Julien, en armure, tient une lance ornée A, B, G d’un pennon et un bouclier orné d’une croix. À sa gauche, une paire de ceps (entraves). Légende : SAINCT IVLIAN DE VOVANT ou SAINCT + IVLIAM + DE + 11 5 1 1 5 4 2 2 2 1 2 1 B 1 1 A, B 40 8 A, B 5 4 B 6 2 VOVANTE 13. 40. Julien l’Hospitalier 41. Louis roi des Français 42. Mansuy de Toul Julien, debout ou accroupi dans la D partie gauche de sa barque, la fait avancer à l’aide d’une rame. À l’autre bout de la barque, sa femme, surmontée d’étoiles, tient une lanterne. Il font passer le Christ, en habit de pèlerin, portant une coquille, debout au centre Louis IX (Saint Louis), debout de face, A couronné, vêtu d’un manteau royal semé de fleurs de lys, tenant le sceptre et la main de justice. Légende : + S + LVDOVICVS + + FRANCORON +REX + 14. Mansuy, debout à gauche, en évêque et A tenant une croix de procession, bénit le jeune fils du gouverneur qui s’est noyé dans la Moselle. Légende : SANCTV . E . MONDU 15. 43. Martin de Tours 44. Mathurin de Larchant 45. Michel 46. Nicolas 47. Pierre Martin, en habit de noble, sur son cheval, coupe son manteau de son épée et en donne une partie au mendiant, appuyé sur une canne, à droite. Légende : S/M. Mathurin debout au centre, tenant un livre, fait le signe de croix pour exorciser Théodora, couronnée, dans l’attitude de la prière, à sa gauche. Le démon chassé s’élève de la tête de la jeune fille en se tordant. Parfois, derrière le saint, l’empereur Maximien, en prière, et/ou une paire de ceps. Légende : S/M ou S MATVRIN. Variante 1. L’archange ailé, vêtu d’une armure, tient un bouclier orné d’une croix et terrasse de son épée levée le dragon (ou un démon) qu’il maintient au sol de son pied. Variante 2. Michel pèse les âmes : un démon à droite entraîne hors de la balance le damné, tandis qu’un ange à gauche accueille le juste. Nicolas debout à gauche, en évêque, mitré, tenant une crosse, bénit de sa main droite les trois enfants qui, debout dans le saloir, s’apprêtent à en sortir. Derrière lui, parfois, une ville. Légende : S BEATE PATER NICOLAS [ORA PRO] NOBIS ou S . NICOLAE . ORA . PRO . NOBIS ou S . NICOLAS . ORA . PRO . NOBIS ou BEATE . SANCTE . NICOLAE . ORA . PRO . NOBIS . M. Pierre, en apôtre, à gauche, tient une clé dans la main gauche et un livre dans la droite. Légende : S/P. 22 A, B, D, 18 K, L 11 B 1 3 48. Quentin Variante 1. Quentin, assis sur un banc de face, mi-nu, flanqué de deux soldats qui lui plantent des broches dans les épaules. Variante 2. Buste de Quentin, tonsuré, de face, des broches plantées dans les épaules. Légende : SANCTE . CANTINNE . ORA . PRO . NOBIS . DIEX 16. Variante 3. Quentin, de face, presque nu, les mains, les jambes et les pieds entravés, des broches plantées dans les épaules. 49. Quirin de Neuss Quirin debout à gauche, en soldat, tient une targe semée de besants et une lance portant un gonfanon semé de même. Légende : SANCTE + CIRINVE + ORA + PRO + NOBIS 17. 50. Roch Roch, en pèlerin, debout de face, exhibe sa blessure. A droite, le chien, à gauche, un ange. Légende : S / ROC. 51. Sébastien Sébastien, quasi nu, debout, les mains liées à un arbre, est transpercé de flèches par un archer à gauche ou deux archers de part et d’autre. Parfois, un carquois au sol. 52. Servais de Variante 1. Servais, debout, barbu, en évêque, mitré, tenant une crosse et une Tongres croix. À ses pieds, le dragon terrassé. Un modèle figure ses attributs : une coupe et une étoffe. Variante 2. Servais, en évêque, avec les mêmes attributs mais imberbe et sans le dragon. Derrière lui, une ville. Légende : S + SAIRVESIX 18. 53. Simon de Cyrène Simon, debout à droite, tient une croix 19 et un livre. Légende : + S + SIMON + ORA + PRO + NOBIS +. 54. Thibaut de Thibaut de Provins, vêtu en noble, sur Provins (frg.) ? un cheval à gauche, tient une hache dans la main droite. Devant le cheval, son ami Gautier l’accompagne au moment de quitter Provins. Derrière, une botte et une sacoche (?). 55. Indéterminé (frg.) Évêque tenant une crosse. À sa droite, face à lui, un personnage suppliant à genoux, serrant un tissu contre lui (lépreux ?). 56. Indéterminé 20 Roi couronné à cheval levant son épée pour frapper un ennemi devant lui. Sous le cheval, le cadavre d’un autre ennemi. Armoiries de France sur le cheval et l’écu. Légende : LYZ. 57. Indéterminé (frg.) Apôtre debout à gauche tenant un livre et un autre attribut indéterminé. Légende : S/[…]. 58. Indéterminé Apôtre (?) de face, tenant une croix de procession. 59. Indéterminé Homme de face, vêtu d’un large manteau et coiffé d’un chapeau où est planté une plume, tenant une fleur dans la main droite. 23 B 2 1 B 2 1 G 1 1 A 2 2 A, B 3 2 B, E 9 4 A, F, J 10 3 B 1 1 A 3 1 A 1 1 A 1 1 A 1 1 B 1 1 B 1 1 A 1 1 Saintes 60. Anne trinitaire Anne et Marie assises face à face ; entre elles, l’enfant Jésus. Barbe, debout, tient la palme du martyre et un livre ouvert ; au second plan, la tour de son supplice. Légende : SANCTA . BARBARA . ORA . PRO . NOBIS plus ou moins abrégée ou SANCTA BARBARA. Catherine, debout de face, couronnée, foule aux pieds un des savants païens qu’elle a combattus. Elle tient une épée et un livre ; derrière elle, la roue du supplice et une palme. Hélène, couronnée, exhibe la sainte tunique. Autour d’elle, les objets de la Passion : couteau, clou, bâton, dé. Sur un des modèles, elle tient en outre la vraie croix. Marguerite issant du dragon qui se tord sur le sol, tient une croix de ses mains jointes en prière. Légende : SANCTA M[ARGARETA + ORA + PRO +] NOBIS. Syre, debout, coiffée d’un large chapeau, tient un livre et un bourdon de pèlerin. Légende : . S ./. SIRE. Véronique, debout de face, présente le voile sur lequel est imprimée la face du Christ, tête nue. Sainte indéterminée debout à droite, tenant un livre. A sa gauche, une colonne. Légende : SANCTA […]. A Jacques à gauche, en habit de pèlerin ; Barbe à droite tient la palme du martyre et un livre. À l’arrière-plan la tour de Barbe. 69. Barbe + Barbe à gauche tient la palme du martyre Nicolas et un livre ; Nicolas à droite, en évêque. Entre eux, les trois enfants sortent du saloir. Au second plan, la tour de Barbe. 70. Barbe + Barbe à gauche tient la palme du martyre Sébastien et un livre ; Sébastien, à droite, lié à un tronc, percé de cinq flèches. Entre eux, la tour de Barbe. 71. Barbe + Vierge Vierge à l’enfant rayonnante de gloire et couronnée à gauche ; à droite Barbe tenant la palme du martyre et un livre. Entre eux, la tour de Barbe. 72. Hélène + Bustes d’Hélène et de la Vierge face à Vierge face. La première tient une maquette d’église, la seconde l’enfant Jésus. Devant elles, la sainte tunique, flanquée d’une tunique en miniature à droite et d’une étoffe pliée à gauche. 73. Pierre + Paul Paul, débout à gauche, tient une épée et un livre ; Pierre à sa droite, debout, tient une clé et un livre. 74. Véronique + Véronique, de face, tend le voile portant Pierre et Paul la face du Christ coiffé de la couronne d’épines. Elle est flanquée de Pierre, tenant sa clé, et de Paul, tenant une épée. 61 Barbe 62. Catherine d’Alexandrie 63. Hélène 64. Marguerite d’Antioche (frg.) 65. Syre 66. Véronique 67. Indéterminé (frg.) 3 2 A, B, C, 71 D, G, M 37 B, G 4 2 B, J 5 2 A 1 1 G 1 1 A, B 3 2 B 1 1 A 1 1 A 6 3 A 1 1 B 3 1 A 1 1 A 1 1 A 1 1 Plusieurs saints 68. Barbe + Jacques 24 Type laïc 75. Armoiries Écus de France et d’Anne de Bretagne de A part et d’autre d’un arbre auquel ils sont tous les deux liés. 1 1 Personnage entre deux colonnes, une clé A à sa gauche Légende incohérente : BNNAVV[…] / SIAD. Saint ou sainte tenant la palme du A martyre. Barbe ? 1 1 1 1 Types indéfinissables 76. Indéterminé (frg.) 77. Indéterminé (frg.) Notes du texte * Nous remercions vivement toutes les personnes qui nous ont transmis les photographies et les données des boutonsenseignes en leur possession ainsi que celles qui nous ont plus largement facilité l’accès à ces données. Notre gratitude va également à Gisèle Besson (ENS Lyon), Nicole Bériou (Université Lumière, Lyon 2) et Claudia Rabel (IRHT), à qui ce travail doit énormément, et à Camille Bellenger,pourses conseils et ses dessins. 1. Denis BRUNA, Enseignes de pèlerinages et enseignes profanes. Musée national duMoyen Âge-Thermes de Cluny, Paris, 1996 ; ID., Enseignes de plomb et autres menues chosettes du Moyen Âge, Paris, 2006. 2. KurtKÖSTER, Pilgerzeichen und Pilgermuscheln von mittelalterlichen Santiagostrassen. Saint-Léonard, Rocamadour, Saint-Gilles, Santiago de Compostela, Neumünster, 1983 (Ausgrabungen in Schleswig, 2) ; Lars ANDERSSON, Pilgrimsmärken och vallfart. Medeltide pilgrimskultur i Skandinavien, Kumla, 1989 (Lund Studies in Medieval Archaeology, 7) ; Hendrik Jan Engelbert VAN BEUNINGEN et Adrianus Maria KOLDEWEIJ, Heilig en profaan. 1000 laatmiddeleeuwse insignes uit de collectie H. J. E. Van Beuningen, Cothen, 1993 (Rotterdam Papers, 8) ;H.J. E.VANBEUNINGEN, A.M.KOLDEWEIJ etDoryKICKEN, Heilig en profaan. 2. 1200 laatmiddeleeuwse insignes uit openbare en particuliere collecties, Cothen, 2001 (Rotterdam Papers, 12) ; Das Zeichen am Hut im Mittelalter. Europäische Reisemarkierungen. Symposion in memoriam Kurt Köster (1912-1986) und Katalog der Pilgerzeichen im Kunstgewerbemuseum und im Museum für ByzantinischeKunst der Staatlichen Museen zu Berlin, dir. Hartmut KÜHNE, Lothar LAMBACHER et Konrad VANJA, Berlin, 2008 (EuropäischeWallfahrtsstudien, 4) ; Brian SPENCER, Pilgrim Souvenirs and Secular Badges. Medieval Finds from Excavations in London, Woodbridge-New-York, 2010 ; Jungfrauen, Engel, Phallustiere. Die Sammlung mittelalterlicher französischer Pilgerzeichen des Kunstgewerbemuseums in Prag und des Nationalmuseums Prag, dir. Carina BRUMME, Helena KOENIGSMARKOVÁ et H. KÜHNE, Berlin, 2013. 3. Arthur FORGEAIS, Notice sur des plombs historiés trouvés dans la Seine, Paris, 1858. Si ces auteurs n’ont pas eu de successeurs avant la fin du XXe siècle, c’est très certainement en raison du Revue Mabillon, n.s., t. 28 (= t. 89), 2017, p. 173215. jugement négatif porté sur ces objets considérés comme grossiers et populaires : D. BRUNA, Enseignes de plomb, op.cit., p. 17-20. 4. Opération « La cour des écoles » menée sous la direction de François Calligny-Delahaye et Serge Mantelé (INRAP) : Françoise LABAUNE-JEAN, « Une production d’enseignes de pèlerin au Mont-Saint-Michel », Archéopages, t. 18, 2007, p. 80-81 ; Le plomb et la pierre. Petits objets de dévotion pour les pèlerins du Mont-Saint-Michel, de la conception à la production (XIVe- XVe siècles), dir. F. LABAUNE-JEAN, Caen, 2016 (Publications du CRAHAM. Série antique et médiévale) ; D. BRUNA et F. LABAUNE-JEAN, « Images de l’archange saint Michel dans les moules à enseignes de pèlerinage récemment découverts au Mont-Saint-Michel », dans Représentations du Mont et de l’archange saint Michel dans la littérature et dans les arts, dir. Pierre BOUET, Giorgio OTRANTO, André VAUCHEZ et al., Bari, 2011 (Bibliotheca Michaelica, 6), p. 183-197. 5. Fouille « Coeur de ville » du service archéologique de laVille deValenciennes. Ces enseignes semblent avoir été jetées dans la rivière en guise d’ex-voto :ArnaudTIXADOR, Enseignes sacrées et profanes médiévales découvertes à Valenciennes. Un peu plus d’un kilogramme d’histoire, Valenciennes, 2004,p. 9-13. 6. Loïc BERTON, « Un moule à enseignes pour le Saint Suaire de Lirey (Aube) », Détection passion, t. 92, 2011, p. 24-25 ; Alain HOURSEAU, Autour du Saint Suaire et de la collégiale de Lirey (Aube),Paris, 2012, p. 233-240. On pourrait ajouter le corpus de moules d’objets en plomb découvert à Rennes en 1998 mais il ne contient aucun moule d’enseigne à proprement parler : F. LABAUNE-JEAN, « Quelques enseignes de pèlerins et des moules de production de petits objets en plomb découverts à Rennes », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, t. 121, no 4, 2014, p. 7-22. 25 7. Les illustrations présentent un échantillon caractéristique de boutons-enseignes qui ne prétend pas être exhaustif car le choix des modèles représentés a largement dépendu de la qualité des photographies mises à notre disposition. 8. Adrien BLANCHET, « Sur une classe inédite d’enseignes de pèlerinage », Bulletin de la Société nationale des antiquaires de France, 1923, p. 203-209, ici p. 206 ; John EVANS, « Notes on a Collection of Pilgrims’ Signs or Amulets », Proceedings of the Society of Antiquaries of London, 2e série, t. 22, 1908, p. 102-117, ici p. 102. 9. Eugène HUCHER, Des enseignes de pèlerinage. Extrait du Bulletin monumental, Caen- Paris, 1853, p. 27-29 ; A. FORGEAIS, Collection de plombs historiés trouvés dans la Seine. Deuxième série. Enseignes de pèlerinage, Paris, 1863, p. 180-181 ; Louis DANCOISNE, Les médailles religieuses du Pas-de-Calais, extrait des Mémoires de l’Académie d’Arras, Arras 1880, p. 26-27. 10. E. HUCHER, Des enseignes de pèlerinage, op. cit., p. 26. 11. A. BLANCHET, « Sur une classe inédite d’enseignes », art. cit., p. 203. Même comparaison dans J. EVANS, « Notes on a Collection », art. cit., p. 102. 12. L. BERTON, « Les boutons-enseignes (a) », Détection passion, t. 46, 2003, p. 12-14 ; ID., « Les boutons-enseignes (b) », Détection passion, t. 87, 2010, p. 46-50. 13. Camille ENLART, Manuel d’archéologie française depuis les temps mérovingiens jusqu’à la Renaissance. Tome III. Le costume, Paris, 1916, p. 247-249 ; Chiara FRUGONI, Le Moyen Âge sur le bout du nez. Lunettes, boutons et autres inventions médiévales, Paris, 2011 (Les Belles Lettres. Histoire), p. 133-134. 14. D. BRUNA, Enseignes de plomb, op. cit., p. 54-55. 15. Odile BLANC, Parades et parures. L’invention du corps de mode à la fin du Moyen Âge, Paris, 1997 (Le temps des images), p. 73-76. 16. Audrey SULPICE, « LeTreictié des nouvelletez dou monde », dans Sens, rhétorique etmusique. Études réunies en hommage à Jacqueline Cerquiglini-Toulet, dir. Sophie ALBERT, Mireille DEMAULES, Estelle DOUDET et al., Paris, 2015 (Colloques, congrès et conférences sur le Moyen Âge, 21), p. 723-735, ici p. 730. Le rapprochement n’a pas été fait dans la recherche actuelle entre les enseignes et les boutons : ces deux groupes d’objets demeurent traditionnellement cantonnés, pour le premier, dans les champs de l’histoire et de l’art religieux, et pour le second, dans le domaine de l’histoireducostume (voir par exemple,C.ENLART,Manuel d’archéologie française, op. cit., p. 247-249, 302-305). Les boutons-enseignes invitent à interroger leurs rapports. Bien que la période qui nous occupe n’y soit pas abordée, on trouvera, sur le bouton, une bibliographie importante mais caractéristique de cette frontière dans le catalogue de l’exposition qui lui a été consacrée en 2015 au musée des Arts décoratifs : Dé-boutonner la mode, dir. Véronique BELLOIR, Paris. 17. A. BLANCHET, « Sur une classe inédite d’enseignes », art. cit., p. 206 : « Les types décrits ici indiquent une évolution artistique déjà accentuée, et d’autre part, les trois légendes relevées, bien que renfermant encore des M, A et E de forme ancienne, indiquent une époque tardive dans le XVe siècle, et la forme de D paraît fréquemment sur les monnaies de Louis XII [1498-1515]. » Voir aussi J. EVANS, « Notes on a Collection », art. cit., p. 103 : « As to date, the style of drawing and the lettering of some of the inscriptions point to a period between the last quarter of the fifteenth century and the first half of the sixteenth. » 18. A. HOURSEAU, Autour du Saint Suaire, op. cit., p. 239. Même datation dans D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 62. 19. Avec les sept glaives en deux groupes de trois et quatre glaives : Pascal-Raphaël AMBROGI et Dominique LE TOURNEAU, Dictionnaire encyclopédique de Marie, Paris, 2015, p. 553. 20. D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 143. 21. Cette durée équivaut à trois ou quatre générations d’artisans et l’on peut supposer que les moules étaient transmis sur plusieurs générations comme le montre D. BRUNA dans Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 60, à propos des moules d’enseignes en plomb-étain parfois réutilisés pendant plusieurs siècles. 22. D. BRUNA, « Témoins de dévotions dans les livres d’heures à la fin du Moyen Âge », Revue Mabillon, n. s., t. 9 (= t. 70), 1998, p. 127-161, ici p. 129-133. On trouve néanmoins la trace d’images pieuses dès le début du XVe siècle : A. VAUCHEZ, La sainteté en Occident aux derniers siècles du Moyen Âge d’après les procès de canonisation et les documents hagiographiques, 1re éd. Rome-Paris, 1981 ; Rome-Paris, 1988 (Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome, 241), p. 527. 23. L’analyse a donné précisément les proportions suivantes : Cu 61,22 %, Sn 28,69 %, Zn 4,38 %, Pb 4,13 %, Fe 1,38 %, Ag 0,19 %. Voir : Portable Antiquities Scheme database [en ligne], URL : https ://finds.org.uk/database, identifiant : WMIDC2E4D4, dernière mise à jour le 20/05/2015, page consultée le 23/08/2017. Pour les hypothèses anciennes : « cuivre fort 26 argenté [qui] paraît avoir été niéll[é] autrefois » (L. DANCOISNE, Les médailles religieuses du Pas-de-Calais, op. cit., p. 26) ; « bronze plus ou moins blanchâtre » (A. BLANCHET, « Sur une classe inédite d’enseignes » art. cit., p. 203) ; « bronze, occasionally with so large a proportion of tin in it as to form a ‘‘speculum metal’’ » (J. EVANS, « Notes on a Collection », art. cit., p. 103) ; « bronze étamé » (Thierry LEINENWEBER, Les boutons-enseignes en bronze étamé du XVe/ XVIe siècles, [en ligne], URL : http://medailles-religieuses.blog4ever.com/article, mise en ligne et dernière mise à jour le 24/02/2014, page consultée le 23/08/2017 ; « bronze à forte proportion d’étain imitant l’argent » (L. BERTON, « Les boutons-enseignes [b] », art. cit., p. 46). Cet alliage présente le défaut d’être très cassant, comme en atteste la grande quantité d’exemplaires fragmentaires (102 soit le quart du corpus), bien que le zinc et le plomb soient censés en augmenter la malléabilité. 24. Daté « fin XVe s. », il est conservé au musée de Cluny et a été publié dans D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 191 (cat. 289). 25. D. BRUNA, Enseignes de plomb, op. cit., p. 74. 26. La forme de treize exemplaires fragmentaires n’a pas pu être identifiée. 27. La classification que nous proposons ici comporte d’inévitables limites : plusieurs exemplaires présentent une forme intermédiaire notamment entre B et E ; la formeHest douteuse car connue uniquement par un exemplaire fragmentaire qui pourrait correspondre à la forme G ; la forme N, citée dans une étude, ne correspond à aucun exemplaire de notre corpus (Th. LEINENWEBER, Les boutons-enseignes en bronze étamé, op. cit.) mais la mentionner nous permet de prendre en compte la totalité des formes connues à ce jour. 28. L. BERTON, « Les boutons-enseignes (b) », art. cit., p. 46. 29. Il confirme ainsi l’intuition de J. EVANS, « Notes on a Collection », art. cit., p. 103 et 117. 30. E. HUCHER, Des enseignes de pèlerinage, op. cit., p. 28-29. 31. A. FORGEAIS, Collection de plombs historiés, op. cit. 32. L. DANCOISNE, Les médailles religieuses du Pas-de-Calais, op. cit., p. 26. 33. J. EVANS, « Notes on a Collection », art. cit. 34. A. BLANCHET, « Sur une classe inédite d’enseignes », art. cit. 35. Ibid., p. 203 et 205. 36. J. EVANS, « Notes on a Collection », art. cit., p. 102-104. Malgré la proximité des deux publications, rien ne permet d’affirmer qu’A. Blanchet ait eu connaissance de l’article de son prédécesseur anglais. 37. A. BLANCHET, « Sur une classe inédite d’enseignes », art. cit., p. 209. 38. Henry-René D’ALLEMAGNE, Les accessoires du costume et du mobilier depuis le treizième jusqu’au milieu du dixneuvième siècle. Ouvrage contenant 393 phototypies reproduisant plus de 3 000 documents, 3 vol., Paris, 1928, vol. I, pl. XVI. 39. Notamment à l’ouvrage de L. DANCOISNE, Les médailles religieuses du Pas-de-Calais, op. cit. 40. D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 62. 41. L. BERTON, « Les boutons-enseignes. Suite », Détection passion, t. 57, 2005, p. 8-10 et 20 ; ID., « Les boutonsenseignes (b) », art. cit., p. 47. Son travail a été un temps poursuivi par Th. Leinenweber : ID., Les boutons-enseignes en bronze étamé, op. cit. Ils ajoutaient cependant un certain nombre de types qu’ils considéraient comme des boutons-enseignes (boutons de forme A ou B, présentant le plus souvent une lettrine, parfois un monogramme ou un symbole, gravés en creux) mais que nous excluons de cette étude pour des raisons de taille (ils sont nettement plus petits), de style, de facture et de sujet (ils ne représentent jamais de saints personnages ou de reliques) qui les distinguent radicalement de la catégorie ici abordée. 42. La description de chaque type est donnée dans l’annexe ; les nombres entre parenthèses accolés à chaque type correspondent au nombre d’exemplaires recensés. Deux exemplaires illisibles ont été ignorés. 43. Le IVe siècle en livre, à lui seul, treize (contre cinq pour le IIIe, et un seul pour le IIe). 44. D. BRUNA, Enseignes de plomb, op. cit., p. 99-102 ; A. TIXADOR, Enseignes sacrées et profanes, op. cit., p. 19-50. 45. D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 62. 27 46. ID., Enseignes de plomb, op. cit., p. 64. 47. ID., Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 156-160 ; A. TIXADOR, Enseignes sacrées et profanes, op. cit., p. 34-35. 48. Il en va de même pour Notre Dame de Liesse, Éloi et Servais. 49. D. BRUNA, Enseignes de plomb, op. cit., p. 71-73. 50. Ibid., p. 58. 51. E. HUCHER, Des enseignes de pèlerinage, op. cit., p. 26-28 ; A. FORGEAIS, Collection de plombs historiés, op. cit., p. 180-181 ; L. DANCOISNE, Les médailles religieuses du Pas-de- Calais, op. cit., p. 27 ; A. BLANCHET, « Sur une classe inédite d’enseignes », art. cit., p. 205-209. 52. E. HUCHER, Des enseignes de pèlerinage, op. cit., p. 28-29 : « Cette enseigne [de sainte Barbe] est-elle un signe de pèlerinage ou une médaille de confrérie ? Je ne saurais le dire. [...] [Elle peut] fort bien avoir été, au commencement du XVIe siècle, la médaille de corporation des canonniers [...] Rien n’empêche de supposer que notre enseigne figurait au XVIe siècle, soit au bonnet, soit au pourpoint des compagnons du Tonnoire. » Il se refusait néanmoins à trancher et favorisait l’hypothèse d’une enseigne de pèlerinage. Localement, il n’est pas impossible que certains boutons-enseignes aient été des enseignes de corporation ; à ce niveau, il n’y a toutefois plus vraiment de différence entre une pratique personnelle de dévotion et la manifestation de l’appartenance à une communauté qui se reconnaît particulièrement dans un saint ou une scène religieuse. 53. D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 13-20. 54. ID., Enseignes de plomb, op. cit., p. 88-90, ici p. 89 : « Au Puy [...] les pèlerins pouvaient acheter, en plus de l’enseigne à l’image de la Vierge, celles représentant saint Michel, saint Georges ou sainte Catherine. » 55. L’assimilation systématique, tentante mais trop réductrice, des boutons-enseignes à des enseignes de pèlerinage a de fait été remise en cause dès le début du XXe siècle, par J. Evans, et plus récemment par L. Berton. 56. Letype des armesd’Annede Bretagne (parties dès la signature de l’union avec Charles VIII en 1491), l’absence de devise et le type indéfini de l’arbre ne permettent pas de trancher. Le motif de l’écu suspendu à un arbre, fréquent dès le XIVe siècle, est ici un symbole de fécondité, de pérennité de la dynastie (un enjeu crucial pour les souverains concernés) ; ce type de mise en scène est fréquent dans les décors d’entrées, les marques d’imprimeurs, etc. Le choix de ramener à trois les hermines de Bretagne, d’ordinaire en semé, en miroir des lys de France, permet de recomposer des armes avec un lis entier, une hermine entière et un demi lis-hermine ; cette mise en forme semble plutôt rare (informations aimablement fournies par Laurent Hablot). 57. Plusieurs modèles commémorent des funérailles (Prince Noir, Bertrand du Guesclin), la manifestation de l’appartenance à un parti ou des fêtes profanes :D. BRUNA, Enseignes de plomb, op. cit., p. 155-161 ; D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 277-298. 58. L. BERTON, « Les boutons-enseignes (b) », art. cit., p. 46. 59. J. EVANS, « Notes on a Collection », art. cit., p. 103. 60. Louis RÉAU, Iconographie de l’art chrétien, 3 t. en 6 vol., Paris, 1955-1959, vol. III/1 : Iconographie des saints. A-F, p. 169-170 ; Gaston DUCHET-SUCHAUX et Michel PASTOUREAU, La Bible et les saints. Guide iconographique, Paris, 1990, p. 56-57 ; Mario LONGTIN, « Maçons, trois fenêtres s’il vous plaît ! Le Mystère de sainte Barbe en 5 journées. Un décor qui se construit ? », dans Par la fenestre. Études de littérature et de civilisation médiévales, dir. Chantal CONNOCHIE-BOURGNE, Aix-en-Provence, 2003 (Senefiance, 49), p. 307-318, ici p. 307 ; D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 120 ; D. BRUNA, « Témoins de dévotions », art. cit., p. 133 et 139. 61. Son père et bourreau avait été frappé par la foudre après l’avoir décapitée. 62. L. RÉAU, Iconographie de l’art chrétien, op. cit., vol. III/1, p. 170-173. 63. Cité par L. RÉAU, ibid., p. 171. 64. Aucune Vie ne rapporte cette promesse qui n’en est pas moins fermement ancrée dans l’imaginaire populaire : Hélène MILLET, « Eustache Deschamps, précoce témoin de la dévotion aux ‘‘saints privilégiés’’ », dans Eustache Deschamps, témoin et modèle. Littérature et société politique (XIVe-XVIe siècles), dir. Thierry LASSABATÈRE et Miren LACASSAGNE, Paris, 2008 (Cultures et civilisations médiévales, 41), p. 159-171, ici p. 159-160. 65. Petr HLAVÁCˇEK, « Vierzehn Nothelfer. Ein Kulturkode des mitteleuropäischen Spätmittelalters ? », dans La Cour céleste. La commémoration collective des saints au Moyen Âge et à l’époque moderne. Actes du colloque de Villetaneuse et 28 de Paris (Université Paris 13-Sorbonne Paris Cité et EHESS, 31 mai-2 juin 2012), dir. Olivier MARIN et Céline VINCENTCASSY, Turnhout, 2014 (Répertoire iconographique de la littérature du Moyen Âge. Les études du RILMA, 6), p. 261-267, ici p. 261 ; H. MILLET, « Eustache Deschamps », art. cit., p. 160-161 ; L. RÉAU, Iconographie de l’art chrétien, op. cit., vol. III/2 : Iconographie des saints. G-0, p. 681-682 ; Lexikon der Christlichen Ikonographie, dir. Engelbert KIRSCHBAUM et Wolgang BRAUNFELS, 8 vol., Rome-Fribourg-Bâle et al., 1968-1976, vol. VIII : Ikonographie der Heiligen, p. 546-550. 66. H.MILLET, « Eustache Deschamps », art. cit., p. 159-171 ; EAD., « Expressions d’une foi », dans Eustache Deschamps en son temps, dir. Jean-Patrice BOUDET et H. MILLET, Paris, 1997 (Textes et documents d’histoire médiévale, 1), p. 63-87. 67. OEuvres complètes de Eustache Deschamps publiées d’après le manuscrit de la Bibliothèque nationale, éd. marquis de QUEUX DE SAINT-HILAIRE et Gaston RAYNAUD, 11 vol., Paris, 1878-1903 (Publications de la Société des anciens textes français), vol. I, ball. 32, p. 114-115. 68. Ottó GECSER, « Holy Helpers and the Transformation of Saintly Patronage at the End of the Middle Ages », Annual of Medieval Studies at CEU, t. 22, 2016, p. 174-201, ici p. 190-199 : seules Catherine et Marguerite, parmi les saints qui nous occupent, ont un pouvoir auxiliaire dans la Légende dorée de Jacques de Voragine ! 69. L. RÉAU, Iconographie de l’art chrétien, op. cit., vol. III/2, p. 680-683. 70. H.MILLET, « Eustache Deschamps », art. cit., p. 159. Cette liste, nous le verrons, a une aire de diffusion proche de celle des boutons-enseignes : Paris, Troyes, Mons en Belgique (ibid., p. 165-167). 71. Il n’y a pas cependant de rapport direct entre les boutons-enseignes et les listes d’intercesseurs. 72. Decem praecepta Wittenbergensi praedicata populo. 1518 dans D. Martin Luthers Werke. Kritische Gesamtausgabe, 80 vol.,Weimar, 1883-1929, vol. I, p. 398-521 ; JEAN GERSON, OEuvres complètes, éd. Palémon GLORIEUX, 10 t. en 11 vol., Paris, 1960-1973, vol. VIII : L’œuvre spirituelle et pastorale, p. 108. Ces textes sont cités, avec d’autres, dans O. GECSER, « Holy Helpers », art. cit., p. 179-190. 73. Les études sur les saints thaumaturges sont nombreuses, on se reportera en particulier à A. VAUCHEZ, La sainteté en Occident, op. cit., p. 544-558, qui met en évidence l’élargissement, à la fin du Moyen Âge, des circonstances d’invocation des saints, et à Jacques PAUL, « Miracles et mentalité religieuse populaire à Marseille au début du XIVe siècle », Cahiers de Fanjeaux, t. 11 : La religion populaire en Languedoc du XIIIe siècle à la moitié du XIVe siècle, 1976, p. 61-90. 74. Sur la formulation des voeux précédés d’une parole d’invocation : J. PAUL, « Miracles et mentalité religieuse populaire », art. cit., p. 73-86. 75. A. VAUCHEZ, La sainteté en Occident, op. cit., p. 519-529. Voir également J. PAUL, « Miracles et mentalité religieuse populaire », art. cit., p. 69-86. 76. A. VAUCHEZ, La sainteté en Occident, op. cit., p. 522-524. 77. Les boutons-enseignes trouvés hors de France (et toujours dans des pays frontaliers) ne sont ni assez nombreux, ni assez bien localisés pour être analysés statistiquement : treize aux Pays-Bas, sept en Angleterre, deux en Belgique et un en Confédération helvétique. 78. Cette reconstitution se fonde sur le pseudonyme de l’inventeur lorsqu’il permet d’identifier un numéro de département ou sur la localisation de l’objet dans le cas d’une vente. Malgré des limites certaines, elle est statistiquement satisfaisante : l’application de cette méthode à des exemplaires dont la provenance était par ailleurs connue avec certitude montre qu’elle est valable dans approximativement deux cas sur trois. 79. Moyenne du pourcentage des exemplaires dont la provenance est certaine et du pourcentage des exemplaires dont la provenance est hypothétique. 80. D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 171, propose de rattacher certaines enseignes en plomb de Marie-Madeleine au sanctuaire provençal de la basilique de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume. Les boutonsenseignes, qui représentent la rencontre avec le Christ ressuscité (Noli me tangere), s’éloignent cependant de la tradition provençale de Marie-Madeleine prédicatrice ou retirée au désert. 81. Aucun exemplaire n’a été découvert parmi les petits objets de dévotion trouvés à proximité du Mont-Saint-Michel ce qui laisse entendre que les boutons-enseignes de ce saint n’étaient pas liés au pèlerinage normand, contrairement aux époques antérieures (Le plomb et la pierre, op. cit.). Nous le considérons donc comme un saint universel ; son culte était effectivement très développé : Paul PERDRIZET, Le calendrier parisien à la fin du Moyen Âge d’après le bréviaire et les livres d’heures, Paris, 1933 (Publications de la faculté des Lettres de l’Université de Strasbourg, 63), p. 227-230. 82. Aucun exemplaire de bouton-enseigne représentant Pierre ou Pierre et Paul n’a été découvert en Italie : les exemplaires connus reproduisent l’iconographie des plus anciennes enseignes diffusées par la ville romaine (XIII-XIVe siècle) mais 29 diffèrent radicalement des plus récentes (XVe). Il s’agit donc là probablement d’un cas d’imitation iconographique et non d’une production romaine. 83. Nous ne traitons ici que des saints dont le lieu de pèlerinage le plus fréquenté dans la fourchette chronologique qui nous occupe se trouve en France ou dans les régions qui lui sont frontalières, et où ont été découverts les boutons-enseignes. 84. Étant donné que pour un type déterminé le nombre d’exemplaires dont la provenance est connue est souvent très restreint, l’approche statistique est moins fiable et n’a pu être appliquée qu’à une dizaine de types : Crucifixion, Suaire de LireyChambéry, Vierge en gloire, André, Claude, Hubert, Mathurin, Michel, Nicolas, Barbe seule ou accompagnée. Il est impossible d’étudier systématiquement ici l’ensemble des cas de figure. 85. La provenance de dix-neuf exemplaires est connue avec certitude ; celle de huit autres est hypothétique. 86. La provenance de douze exemplaires est connue avec certitude ; celle de six autres est hypothétique. Rien ne soutient l’hypothèse, uniquement fondée sur la localisation des exemplaires, d’un lien avec l’abbaye Saint-Nicolas de Septfontaines (Haute-Marne) : Th. LEINENWEBER, Les boutons-enseignes en bronze étamé, op. cit. 87. D. BRUNA, Enseignes de plomb, op. cit., p. 101-102. 88. L’étude a pu être réalisée pour la Crucifixion, la Vierge en gloire, le Saint Suaire, André et Michel. 89. D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 13-20. La distinction entre enseignes sacrées et enseignes profanes n’est pas plus pertinente selon lui puisque les deux catégories étaient produites et vendues dans les mêmes ateliers et dans les mêmes échoppes. L’enseigne aux armoiries, une probable commande exceptionnelle pour célébrer une union royale, s’inscrit dans ce contexte. 90. D. BRUNA, Enseignes de plomb, op. cit., p. 87-91, ici p. 91. 91. Celles-ci déclinent rapidement dans les premières décenniesduXVIe siècle pour des raisons qu’expose D. Bruna dans Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 13-14. 92. L. BERTON, « Les boutons-enseignes (a) », art. cit., p. 12. S’opposent à ce point de vue aussi bien la chronologie (plusieurs décennies semblent séparer la disparition des boutons-enseignes, au cours de la première moitié du XVIe siècle, de l’apparition des médailles) que l’aire de diffusion limitée de ces objets. 93. La production d’enseignes y est attestée dans le deuxième quart du XVe siècle : Le plomb et la pierre, op. cit., p. 48-51 et 61-75. Certaines enseignes sont néanmoins datées du début du XVIe siècle : D. BRUNA, Enseignes de pèlerinage et enseignes profanes, op. cit., p. 192-193. 94. F. Labaune-Jean dans Le plomb et la pierre, op. cit., p. 181-202 a récemment dressé un bilan des découvertes de moules à enseignes de pèlerinage. 95. J. EVANS, « Notes on a Collection », art. cit., p. 103 : « The designs are without exception artistically drawn, and it seems not improbable that more than one of them are by the same hand though representing different saints. » 96. Le plomb et la pierre, op. cit. 97. Voir la synthèse, toujours d’actualité, de D. BRUNA, Enseignes de plomb, op. cit., p. 53-104. 98. En suivant l’exemple des enseignes en plomb : D. BRUNA, Enseignes de plomb, op. cit., p. 65-68. 99. Jérôme BASCHET, « Inventivité et sérialité des images médiévales. Pour une approche iconographique élargie », Annales. Histoire, sciences sociales, 51e année, vol. 1, 1996, p. 93-133. 100. On y trouve fréquemment des représentations d’Adam et Ève, des scènes des vies de la Vierge etduChrist ainsi que de nombreuses représentations de saints et saintes dans les suffrages : Véronique, Michel, Jean Baptiste (le plus souvent avec l’agneau pascal, occasionnellement dans la scène de la présentation de son chef), Pierre et Paul, Jacques, Étienne, Christophe, Sébastien, Nicolas, Claude, Antoine, Catherine, Marguerite et Barbe apparaissent dans cet ordre dans la plupart des livres d’heures français recensés ; ils sont plus exceptionnellement accompagnés par Julien l’Hospitalier, François d’Assise ou Roch (l’iconographie des livres d’heures imprimés a été étudiée en détail dans Heribert TENSCHERT et Ina NETTEKOVEN, Horae B. M. V. 158 Stundenbuchdrucke der Sammlung Bibermühle, 1490-1550, 9 vol., Rotthalmünster-Ramsen, 2003 [Katalog, 50] ; sur ces recueils, voir plus généralement : P. PERDRIZET, Le calendrier parisien, op. cit.). Les parallèles iconographiques avec les boutons-enseignes, que nous ne pouvons détailler ici, sont souvent frappants. S’il est impossible d’affirmer que l’inspiration est directe, les rapports sont évidents et témoignent d’une circulation des images entre ces deux catégories de supports. Les rapports avec l’iconographie des éditions de la Légende dorée sont en revanche beaucoup plus lointains : Dominique DONADIEU-RIGAUT, « La Légende dorée et ses images. Quelques jalons pour une histoire des Légendes dorées illustrées (XIIIe-XXe siècle) », dans JACQUES DE VORAGINE, La Légende dorée, éd. Alain BOUREAU et Monique GALLET, Paris, 2004 (Bibliothèque de la Pléiade). 30 101. Nous avons renoncé, par souci de concision, à donner ici la description détaillée de ces variations, ou à comparer bordures et légendes ; nous réservons ces éléments pour une étude ultérieure plus approfondie. 102. Les types où Barbe apparaît accompagnée d’un autre saint n’ont pas été pris en compte ; cependant, même si la pluralité des personnages contraint à réduire la place accordée à chacun, les images utilisées semblent en partie les mêmes. 103. Nous n’avons fait qu’aborder l’étude stylistique du corpus. L’étude comparative de l’ensemble des matrices devrait à l’avenir apporter des données précieuses pour comprendre les relations d’imitation, de reprise ou de copie d’un atelier à un autre, donc de dégager les sources et leur diffusion, mais aussi de définir le style d’ateliers particuliers, leur localisation ou encore leur production. Peut-être sera-t-il aussi possible de déterminer plus précisément comment opéraient les graveurs, s’ils travaillaient seuls ou à plusieurs à un même moule, voire de distinguer les mains de maîtres-graveurs et d’apprentis, autrement dit d’entrevoir l’organisation hiérarchiques des ateliers. 104. Le dépouillement d’inventaires seigneuriaux et la lecture de textes littéraires permettra peut-être de préciser ce point. On ne trouve aucun exemple clair de bouton-enseigne dans le glossaire de Victor Gay, ni sous la rubrique « enseigne », ni sous la rubrique « bouton » qui ne rapporte d’ailleurs aucun cas de bouton au motif religieux (ID., Glossaire archéologique du Moyen Âge et de la Renaissance, 2 vol., Paris, 1887, vol. I, p. 204-205 et 633-636). Comme nous l’avons vu, les boutonsenseignes invitent malgré tout à un croisement des deux champs disciplinaires de l’histoire du costume et des pratiques religieuses. 105. JohanHUIZINGA, L’automne du Moyen Âge [1re éd. Haarlem, 1919], trad. Julia BASTIN, [précédé d’un entretien avec J. Le Goff], Paris, 2015 (Petite bibliothèque Payot. Histoire, 6). Notes de l’annexe 1. Quatre-vingt-neuf moules portent une légende (40 %) qui adopte le plus souvent la forme sancte/a [+ vocatif], parfois réduite aux initiales, en français ou en latin (39 moules) ; cette formule est parfois accompagnée du nom du sanctuaire (8). Les prières sont aussi fréquentes : sancte/a (beate/a) [+ vocatif] ora pro me/nobis pour les saints (24) ou O mater Dei memento mei pour la Vierge Marie (4). Les autres formules sont rares (15). Quel qu’ait été le degré de culture du graveur, plusieurs de ces légendes ont manifestement été rédigées par un semi-lettré qui connaît les formules latines mais utilise fréquemment les formes et les prononciations françaises des mots, notamment des noms, qu’il latinise par les désinences (voir notes ad loc. ; analyses linguistiques : information orale de Gisèle Besson). 2. Cette indication signale qu’aucun bouton-enseigne entier n’est connu pour le type en question. La représentation ne peut donc pas être décrite dans sa totalité. 3. Aue gratia. 4. Adoramus te, Christe, et benedicimus te. La formule latine semble connue à l’oreille et retranscrite approximativement (assimilation -mut te et métathèse -mut ste). 5. O mater Dei, memento mei. Même chose pour les types 14, 18, 19. La graphie « memanto » correspond à une prononciation nasalisée comme en français, sans tenir compte du timbre de la voyelle ; la construction avec accusatif (me) copie la construction française. 6. De Boulogne. Graphie française normale. 7. Hypothèse émise dans le catalogue de la vente aux enchères du 5 décembre 2014 de la maison 51 Gallery ; l’identification est possible mais demeure incertaine. 8. Sancte Antoni ora pro me. Sarite témoigne d’une confusion N/RI et de la mauvaise interprétation par le graveur d’une abréviation du modèle (probablement sacte avec titulus). 9. Le flottement du vocatif (-i ou -e) peut s’expliquer aussi bien par une confusion entre la forme des mots en -us et celle des mots en -ius que par une confusion avec le français. 10. Attribution incertaine pour la variante 1 mais probable. Il pourrait s’agit d’un autre saint évêque comme Edmond ou Edme. L’attribution est en revanche assurée pour la variante 2 dont l’iconographie est classique. 11. La graphie rend compte de la prononciation de Franciscus avec simplification du groupe consonantique. 12. Ecce caput sancti Iohannis Baptistae in disco. Le graveur distingue mal les N/V (in disco / iudisco) ; la dentale finale de caput est tombée, sans doute par simplification du groupe consonantique formé avec le s- du mot suivant. 13. Saint Julien de Vouvantes. Graphie française normale. 14. Sanctus Ludouicus Francorum rex. La finale -on correspond à une prononciation du latin avec finale nasalisée. 31 15. Sanctus episcopus Mansuetus. 16. Sancte Quintine ora pro nobis Diex (Saint Quentin, prie pour nous. Dieu !). Cette légende illustre particulièrement bien le mélange de latin et de français récurrent sur plusieurs modèles. Alors que le reste de l’invocation est en latin, Diex, équivalent graphique de Dieus, est en français (le latin serait Dex ou Deus). Il ne peut s’agir que d’un cas sujet à comprendre comme un vocatif correspondant à une exclamation complémentaire de la prière adressée au saint. Cantinne est un vocatif latin formé sur une base de prononciation et de graphie françaises. 17. Sancte Quirine ora pro nobis. 18. Sanctus Seruesius. 19. Simon est ici habillé en apôtre, ce qui pourrait faire penser au zélote ; la croix qu’il tient laisse cependant peu de place au doute : il s’agit certainement de Simon de Cyrène, réquisitionné pour porter la croix du Christ. 20. Il pourrait s’agir de Charlemagne, sans certitude. L’iconographie doit être rapprochée de celle de « saint Jacques Matamore » (information orale de Claudia Rabel). 32